CHARGEMENT
keyboard_arrow_right

Type to search

Le fusil antichar PTRS-41 de calibre 14,5×114 mm

Dans l’éternel duel qui oppose l’épée au bouclier, l’apparition du char d’assaut au cours de la Première Guerre mondiale appelait une réponse adéquate à ce nouvel acteur du champ de bataille. Et les réponses ne se firent pas attendre : parmi elles, en 1918, les Allemands alignèrent le légendaire « Mauser M1918 TankGewehr » (aussi dit « T-Gewehr ») de calibre 13,2×92 mm SR « Tank und Flieger » (TuF), le premier fusil antichar (Photo 02). Si la chose n’est pas surprenante à la fin de la Première Guerre mondiale, l’apparition d’un fusil antichar chez les Soviétiques au commencement de la « Grand Guerre Patriotique » interroge plus.

Des fusils antichars pour la Seconde Guerre mondiale ?

C’est oublier un peu vite que la majorité des chars employés pendant la Seconde Guerre mondiale était loin du niveau de blindage proposé par les emblématiques chars Tigre et Tigre II. Au début du conflit, beaucoup de chars sont finalement « légers et moyens » et donc accessibles à des armements d’une puissance « raisonnable » (tout étant relatif…). À titre indicatif, du côté Allemand, les chiffres suivants (provenant de Wikipédia au 03/04/2023, pas de chichi) donnent un aperçu :

  • Panzerkampfwagen III dit « Panzer III », char moyen de 24 tonnes : 5 774 unités produites à partir de 1935.
  • Sturmgeschütz III dit « Stug III », canon d’assaut de 23,9 tonnes (utilisant le châssis du Panzer III) : 10 086 unités produites à partir de 1940. Il s’agit à priori du char le plus produit par les Allemands pendant la Seconde Guerre mondiale.
  • Panzerkampfwagen IV dit « Panzer IV », char moyen de 25 tonnes : 8 853 unités (char de combat seulement) produites à partir de 1936.
  • Panzerkampfwagen VI dit « Tigre », char lourd de 57 tonnes : 1 295 unités produites à partir de 1942.
  • Panzerkampfwagen Tiger Ausf. B, dit « Tigre II », char lourd de 68,5 tonnes : 492 unités produites à partir de 1944.

Aussi, l’apparition des chars lourds n’éclipsera pas la production en quantité de chars plus légers, à l’instar du chasseur de char « leichter Panzerjäger 38(t) », dit « Hetzer », un char utilisé par les Allemands conçu sur la base du char tcheque « ČKD LT vz. 38 » en 1943 et produit à partir de 1944…à près de 2827 exemplaires (Photo 03) !

Enfin, il est nécessaire de garder à l’esprit que les chars ne constituent pas le seul véhicule du champ de bataille : rien que pour le semi-chenillé (les fameux « Half-track »), les Allemand produiront entre 1938 et 1945 environ 9000 « SonderKraftFahrZeug 11 » (Sd.Kfz. 11) et 15 252 Sd.Kfz.251 entre 1939 et 1945 (Photo 04). Des véhicules essentiels pour le dispositif militaire et qui seront totalement à la merci des fusils antichars…

Pour finir de remettre les choses dans leur contexte, au déclenchement de l’opération Barbarossa, le 22 Juin 1941, les chars Tigre n’étaient que dans les bureaux d’études, et le Tigre II sans doute même pas une idée ! Pour les Soviétiques, la menace était donc principalement constituée par des chars légers et moyens ou des véhicules encore plus légers. Donc finalement, ces véhicules de moins de 25 tonnes (le poids donnant une bonne idée du niveau de blindage) restaient accessibles à un « petit calibre » (au sens militaire Français du terme, soit moins de 20 mm) survitaminé. Et les Soviétiques ne seront pas les seuls à faire ce constat : les Britanniques avec le Boys en calibre .55 Boys, mais aussi les Polonais avec le Wz.35 Maroszek et sa surprenante munition de 7,92×107 DS ainsi que les Allemands avec leur PanzerBüchse 39 (PzB. 39) en 7,92×94 (tout aussi surprenant que la munition Polonaise) …sans oublier les Finlandais et leur superbe Lathi L-39 en 20×138 mm B (Photos 05 et 06). À titre indicatif, selon l’état-major Soviétique, le 01 juin 1941, l’armée Allemande disposait de 25 298 fusils antichars ! Selon Wikipédia (03/03/2023), le PzB.39 aurait été produit entre 1939 et 1941 à 39 232 exemplaires !

Mais comme toujours, avant de produire une arme, il faut déterminer un calibre et une munition.

Le 14,5×114 mm

La réflexion Soviétique en matière de fusil antichar ne date bien évidemment pas de l’attaque Allemande. Dans les années 30, le sujet fut étudié, notamment avec le calibre 12,7×108 mm, dont les munitions proposent des performances finalement proches de la 12,7×99 mm (Photo 07). Cependant, ces deux calibres, excellents pour l’engagement de véhicules légers, de fortifications légères ou pour la défense antiaérienne à basse altitude, atteignaient déjà leurs limites sur des véhicules blindés et notamment sur des chars de combat. La chose n’est pas réellement surprenante, leurs munitions sont globalement conçues par des retours d’expériences réalisés lors de la Première Guerre mondiale. Cette insuffisance fut constatée par les Soviétiques après de multiples essais avec ce calibre. Les essais des fusils antichars utilisant les munitions de 12,7×108 mm furent définitivement arrêtés en 1942.

Ainsi, après reconsidération des tenants et aboutissant des besoins, il fut estimé qu’un projectile de 14,5 mm d’environ 64 g propulsé à 1000 m/s pouvait pénétrer, à 500 m, 20 mm d’acier à blindage sous une incidence de 60° (les 500 m n’étant pas l’alpha et l’oméga de l’emploi de ce calibre…évidemment !).

En conséquence, une munition fut conçue et perfectionnée entre 1938 et 1940 et, le 16 Juillet 1941, la « cartouche de 14,5 avec projectile B-32 » fut officiellement adoptée. Il s’agit donc d’un projectile de 14,5 mm monté sur un étui de 114 mm, qui est annoncé dans sa variante perforante-incendiaire B-32 à 1010 m/s dans les canons des PTRD-41 (1227 mm) et PTRS-41 (1216 mm) (Photo 08). Cette munition, dénommée 57-BZ-561S dans la nomenclature militaire Soviétique, propulse un projectile annoncé à 64 g à l’aide de pas moins de 30,08 g de nitrocellulose simple base tubulaire heptaperforé (7 trous – Photo 09). À 1010 m/s (V0), le projectile développe donc 32 643 joules : un peu moins de deux fois les 17 030 joules d’une 12,7×99 MEN M33 de 43 g tiré à 890 m/s dans le canon d’une M2 ! Mais comparons ce qui est comparable…or, en Occident, s’il y eut bien des essais de calibre .60 aux États-Unis, aucun calibre ne fut jamais adopté. Le projectile de 14,5×114 mm B-32 est composé d’un noyau en acier durci enrobé dans du plomb, coiffé d’une composition incendiaire le tout étant contenu dans une chemise d’acier plaquée tombac ou zinguée. La composition incendiaire est un classique en URSS : mélange de poudre de baryum, aluminium et magnésium, très stable, qui s’initie naturellement par l’énergie de l’impact. Le code couleur de la munition est, en URSS, une pointe rouge surmontée de noir. Au niveau de la conception, cette munition est simplement le « portage » en 14,5×114 mm de la B-32 de 12,7×99 mm. …sauf que dans la 14,5 mm le noyau du projectile a presque les dimensions de la balle de 12,7 mm ! La 14,5×114 mm B-32 constitue, encore aujourd’hui, la munition standard pour ce calibre : il n’y a pas de munition réglementaire à balle « ordinaire » uniquement constituée de plomb chemisé, ni même de noyau en fer doux. La chose est logique, il s’agit de munitions anti-matérielles et non anti-personnelles…du moins d’un point de vue technique. Bien évidemment comme généralement sur un matériel produit sur une aussi longue période, il existe des variations de production et notamment dans ce cas, de longueur du projectile.

Dans la recherche de l’amélioration des capacités de perforation, une munition perforante-incendiaire à noyau à carbure de tungstène sera adoptée le 15 Août 1941 (environ un mois après la B-32) : il s’agit de la BS-41. Le carbure de tungstène étant nettement plus dense que l’acier (près de deux fois plus !), pour une masse proche (annoncé à 65 g), le projectile est plus court que la B-32. Sinon, il reprend les caractéristiques d’incendiaire de la B-32. Il est à noter ici que cette munition est généralement présentée comme étant « la première munition de 14,5×114 mm » employée pendant la Second Guerre mondiale. Or, l’auteur Russe David Naumovich Bolotin détaille avec précision le développement de ce calibre et de ces munitions et donne des dates sans appel. Par ailleurs, la chose paraît logique : dans l’urgence il était plus facile d’extrapoler une technologie déjà connue et maitrisée que de s’aventurer de but en blanc sur un terrain inconnu et plus coûteux. La BS-41 survivra peu de temps à la Grande Guerre Patriotique : son emploi paraissait dévolu au fusil antichar, qui lui aussi sera remisé dans les arsenaux à la fin de la guerre. Si la BS-41 est bien décrite dans le manuel précoce (1957) de la mitrailleuse KPVT, il y est spécifié que l’adoption de la BST, une munition au projectile perforant-incendiaire-traçant, lui aussi au noyau en carbure de tungstène, était destinée à la remplacer. La BS-41 n’est d’ailleurs plus décrite dans le manuel de la KPVT de 1984.

Dans l’absolu, le carbure de tungstène est nettement supérieur à l’acier durci dans le rôle de perforation : à la fois plus dur et dense, les performances de cette munition étaient sans doute supérieures à la B-32…mais pour un coût lui aussi supérieur. À titre indicatif, les variantes modernes de munitions de 14,5×114 mm à noyau carbure de tungstène sont annoncées par leur fabricant comme ayant des capacités de perforation deux fois supérieures à celles d’une B-32 ! La BS-41 est d’ailleurs décrite comme « plus puissante » et « uniquement destinée à être tiré sur des chars » par le manuel réglementaire. Le code couleur de cette munition était : un projectile intégralement verni rouge (débordant même sur le collet de l’étui) dont la pointe et l’amorce sont vernis noir.

Les Russes s’essayèrent aussi sur un concept plus étrange (quoique déjà expérimenté par d’autres) : la munition perforante-lacrymogène dénommée BZKI. Cette munition expérimentale fut développée pendant la guerre, mais ne connut pas de lendemain de par une efficacité très limitée. Très inspirée des « Patrone 318 SmKH-Rs-L’spur» et « Patrone 318 SmK-Rs-L’spur» Allemandes, le but est de forcer l’évacuation d’un char par saturation de lacrymogène dans son habitacle…

Bien évidemment, d’autres munitions seront produites après-guerre : perforante-incendiaire-traçante (BZT et BZTM), traçante-incendiaire (ZP), « incendiaire instantanée » (MDZ – souvent présentée comme explosive-incendiaire) … Mais nous n’allons pas ici nous étendre sur l’étude de la munition de 14,5×114 mm, et notamment de ses variantes modernes : le livre de Philippe Regenstreif regorge d’informations techniques pour ceux que cela intéresse…ne nous livrons pas ici à un plagiat sans vergogne… Nous y apprenons par ailleurs que les Soviétiques expérimentèrent également une autre munition antichar encore plus puissante : la 14,5×148 mm B…soit un projectile de 14,5 mm monté sur une douille de 23×152 mm B ! Cette munition était destinée à être tirée dans un fusil développé par Mikhail Nikolaievitch Blyum en 1943.

Tout comme les 12,7×99 mm et 12,7×108 mm, le calibre de 14,5×114 mm verra son utilisation survivre à la Seconde Guerre mondiale, en étant notamment employé dans la mitrailleuse KPV à partir de 1954…mais aussi dans les PTRD-41 et PTRS-41 encore de nos jours !

Une fois le calibre et la munition choisis, il convenait donc de faire naître un ou plusieurs fusils.

Un accouchement dans la douleur

Précaution préalable : nous n’avons bien évidemment pas accès en première main à l’histoire de l’adoption des fusils antichars en Union Soviétique. Ainsi, la partie historique que vous trouverez ci-dessous provient en très large partie (mais pas uniquement et sans faire du copier-coller !) de l’excellent livre de D.N. Bolotin « Soviet small-arms and ammunition », dont le chapitre sur les fusils antichars est très complet. Rendons à César ce qui est à César.

L’étude des fusils antichars commence tôt dans l’entre-deux-guerres et dès 1931, Leonid Vasilyevich Kurchevsky, conçoit un fusil sans recul de 37 mm testé à partir de Juillet 1932. Quoi qu’intéressante, cette arme ne sera pas produite en grande quantité (et sans doute uniquement à des fins d’essai en corps de troupe). Ces travaux auront plutôt comme conséquence de fermer la porte du développement d’une arme antichar portative de moyen calibre (au sens militaire, entre 20 et 40 mm).

Le 13 Mars 1936, les autorités Soviétiques passèrent une résolution spéciale concernant le développement de fusil antichar en calibre 12,7×108 mm. La conception fut confiée aux concepteurs Mikhail Nikolaievitch Blyum (le même qui fera par la suite le fusil en 14,5×148 mm B), Semen Vasilyevitch Vladimirov (le futur concepteur de la mitrailleuse KPV de calibre 14,5 mm) et Sergey Aleksandrovich Korovin (le concepteur du pistolet TK-26) qui proposèrent 15 modèles de fusil entre 1936 et 1938. Cependant, aucun ne correspondait aux attentes…et de la même façon que le fusil de L.V. Kurchevskiy ferma la porte au moyen calibre, ces études fermèrent la porte au 12,7×108 mm.

À partir de 1939, ce sont des fusils pour la 14,5×114 mm qui furent demandés à Nikolaï Vasilyevitch Rukavishnikov, S.V. Vladimirov, et Boris Gavrilovitch Shpitalniy. Le fusil de N.V. Rukavishnikov, était un semi-automatique à 5 coups fonctionnant par emprunt de gaz. Le fusil de B.G. Shpitalniy était à un coup, avec ouverture automatique de la culasse lors du tir, la mise en œuvre étant assurée par un court recul du canon. Le fusil de S.V. Vladimirov fonctionnait par long recul du canon et avait la particularité de se démonter en deux sous-ensembles aisément transportables par un binôme (car, oui, le fusil antichar reste une arme collective). On note que sur toutes ces armes, l’ouverture du mécanisme de fermeture est automatique lors du tir, même pour des armes à répétition manuelle ou à 1 coup. La chose est en réalité rendue nécessaire par l’effort considérable qui est à réaliser pour décoller l’étui de la chambre à l’issue du tir. La plupart des tireurs de fusil à répétition en calibre 12,7×99 mm ont expérimenté cela…mais dans une moindre mesure : il faut garder ici en tête que la munition développe près de deux fois l’énergie cinétique d’une 12,7×99 mm. Du 13 au 31 Août les tests conclurent que le fusil de N.V. Rukavishnikov était le mieux adapté. L’arme était pratique, aisément transportable par deux hommes et permettait une cadence de tir pratique de 15 coups par minute tout en perçant 20 mm d’acier sous une incidence de 70° à 500 m. De plus amples développements de cette arme seront, dans un premier temps, approuvés pour de nouveaux essais le 7 Octobre 1939, sous l’appellation « ПротивоТанковое Ружьё обр. 1939 » (« ProtivoTankovoe Ruzhe obr. 1939 », soit « fusil antichar de 1939 »). Cependant, le concept étant finalement pensé par les Soviétiques comme inefficace contre des chars de combat modernes et face à certains problèmes rencontrés, les travaux seront finalement ralentis (sans être stoppés). Le 26 Août 1940, les fusils antichars produits seront même retirés du service. On note ici que l’auteur Soviétique D.N. Bolotin considère que le développement du fusil antichar en URSS connaitra les mêmes déboires (avec des problèmes d’analyse sur l’apport tactique de ce type d’arme) que le pistolet-mitrailleur (évoqué dans notre article sur le PPSh-41). On ne peut qu’être d’accord. En Juin 1941, reconsidérant les choses face à l’attaque Allemande le fusil de N.V. Rukavishnikov est finalement approuvé de façon hâtive sans que tous ses défauts soient corrigés. Si l’efficacité de l’arme était considérée par les Soviétiques comme supérieure aux matériels étrangers de par son calibre, le fusil de N.V. Rukavishnikov était finalement trop complexe pour un usage militaire. On peut noter qu’en parallèle de son travail sur le fusil semi-automatique, N.V. Rukavishnikov développera des modèles à répétition manuelle plus légers et plus économiques…une démarche qu’on retrouvera avec l’arme de Degtyarev. Faisant feu de tout bois, les Soviétiques essayeront même de copier le concept du PzB.39 Allemand en calibre 7,92×94 mm, mais sans résultat concluant (ce calibre semble avoir été le 7,62×92 mm).

En Juillet 1941, vraisemblablement sur ordre direct de Staline, qui insistait sur l’importance de fusils antichars face à l’avancée Allemande, de nouveaux concepteurs sont nommés à cette tâche : ce furent les désormais célèbres Vasily Alekseyevich Degtyaryov (DP, DShK-38, RPD-44) et Sergey Gavrilovich Simonov (AVS-36, SKS-45) qui furent désignés pour reprendre le travail en tout hâte. Travaillant « nuit et jour », les deux concepteurs proposèrent des armes en moins de 22 jours ! Probablement un des exemples de développement les plus rapides qui soient…quand nécessité fait loi !

À la fin du mois de Juillet, S.G. Simonov présentait deux modèles de fusil à chargeur. Le premier, développé en collaboration avec Georgiy Semenovitch Garanin, Sergey Mikhaylovitch Krekin et Aleksandr Andreyevitch Dementyev, ouvrait automatiquement la culasse au tir et éjectait la douille, en utilisant le principe du recul de canon. Le second, dessiné par V.A. Degtyarev seul, se contentait d’ouvrir la culasse rotative au tir, sans éjecter l’étui tiré. Les deux armes étaient alimentées par un chargeur de 5 coups. Au début du mois d’Août de la même année, les deux armes sont essayées : le second modèle est préféré, l’arme étant plus simple. Cependant, aucune des deux armes n’était satisfaisante d’un point de vue opérationnel et le concepteur fut renvoyé à ses planches (sans doute avec bienveillance…mais de façon pressante : Staline attend !) avec pour consigne, dans un esprit de simplification, de convertir son arme en fusil à un coup. On note notamment que les deux armes nécessitaient que la munition soit lubrifiée pour extraire convenablement…car oui, contrairement à une légende (à moitié bien fondée), la lubrification des munitions est parfois souhaitable pour le correct fonctionnent des armes…comme évoqué plus haut, l’extraction de ces calibres pouvant être problématique. Ayant effectué les modifications demandées, V.A. Degtyarev reviendra rapidement (Staline attend…) avec un nouveau prototype qui allait devenir le PTRD-41 (Photos 10 et 11). L’arme présentée a l’avantage d’être extrêmement simple à produire, principalement à partir d’opérations de tournage…mais tout ceci est une autre histoire.

De son côté, S.G. Simonov, pour gagner du temps s’appuya sur ses travaux précédents et notamment sur son prototype de fusil semi-automatique de 1938 (concurrent malheureux face au SVT-38 de F.V. Tokarev). Remplaçant l’alimentation par chargeur par un clip introduit (clairement très inspiré du Garand !) dans, dixit D.N. Bolotin, « le but d’alléger une arme » déjà bien lourde, il redessinera également le système de mise à feu, avec la curieuse particularité d’avoir une détente articulée…sa partie inférieure ! L’arme ainsi obtenue est plus simple (à tout point de vue, y compris productique) et plus fiable que l’arme de N.V. Rukavishnikov. Lors des essais, sur plus de 1000 cartouches tirées (en 14,5 mm, ça commence à faire…), pas d’enrayage pour le PTRS-41 et 2 pour celui de N.V. Rukavishnikov.

À l’issue des essais au tir du 29 Août 1941, les armes de V.A. Degtyarev et S.G. Simonov sont adoptées sur les appellations respectives : « ПротивоТанковое Ружьё системы Дегтярёва образца 1941 года » (ProtivoTankovoe Ruzhe systemy Degtyareva obr. 1941 – PTRD-41) et « ПротивоТанковое Ружьё системы Симонова образца 1941 года » (ProtivoTankovoe Ruzhe Simonova systemy obr. 1941 – PTRS-41). Les deux armes furent immédiatement mises en production, la simplicité de celle de V.A. Degtyarev permettant une mise en service plus rapide de l’arme : c’était son but premier. D.N. Bolotin rapporte ainsi qu’il pouvait être produit à l’usine de Kovrov 30 à 40 PTRD-41…par heure ! Ainsi, pendant que l’arme de V.A. Degtyarev sortait de l’usine Kovrov, la production de celle de S.G. Simonov, plus complexe, était mise en place à Tula. Cette mise en production fut ralentie face à l’avancée des troupes Allemandes et au nécessaire déménagement de l’usine vers Saratov. Les deux armes restent mécaniquement très simples : on est très loin des concepts « hypertechnologiques » des « Wunderwaffen » de l’Allemagne Nazi… Think Different ?

Dès l’automne 1941, les premiers PTRD-41 démontrèrent leur efficacité sur le front, à des distances d’engagement pouvant atteindre 400 m. À 100 m, l’arme aurait été même capable de pénétrer la tourelle de bon nombre de chars moyens :  à cette distance, plusieurs sources annoncent la B-32 (avec une V0 de 1010 m/s) avec une perforation de 40 mm d’acier à blindage. Le PTRD-41 ayant eu un rôle important dans la défense de Moscou, V.A. Degtyarev et plusieurs membres de son équipe reçurent la médaille « Pour la Défense de Moscou ». S.G. Simonov sera aussi récipiendaire de cette médaille bien que son arme ait participé dans une moindre mesure à cette bataille. C’est, entre autres choses, la bataille de Stalingrad qui fut au PTRS-41 ce que la bataille de Moscou fut au PTRD-41 : un haut fait d’armes qui sera notamment symbolisé par les combats autour de la « Maison Pavlov », nommée ainsi pour célébrer le sous-officier Yakov Fedotovich Pavlov.

Si le comportement des armes fut convenable pendant l’hiver, l’arrivée du printemps et de la boue (la fameuse « raspoutitsa ») se montra moins favorable et des modifications furent nécessaires pour fiabiliser les nouvelles armes produites. Dans le même esprit un « mémo » en 5 points (« Пять советов бронебойщикам » – Pyat sovetov broneboyshchikam – 5 conseils pour les perceurs d’armure!), rédigé par V.A. Degtyarev pour son fusil, fut adressé par l’armée aux opérateurs de fusils antichars :

  1. Le fusil antichar est plus efficace à des distances n’excédant pas le 250 – 300 m.
  2. Le fusil est fiable s’il est correctement entretenu et que ses pièces mobiles sont lubrifiées (rien de neuf en réalité !)
  3. Un bon entretien du canon permet de conserver ses performances en matière de pénétration après 500 coups malgré une légère perte de la vitesse initiale.
  4. La sensation de recul est fortement atténuée par le coulissement du boîtier dans la crosse pourvu que sa glissière soit correctement lubrifiée et propre. Son nettoyage est aisé, par quelques pressions sur la crosse.
  5. L’arme est précise, mais nécessite un bon réglage des organes de visée et un bon emploi de l’appui-joue et du bipied (bref, une bonne position de tir !)

En réalité, il s’agit de bon sens…mais qui fait trop souvent défaut ! Aujourd’hui encore, on rencontre des personnes qui vous expliquent qu’il ne faut pas mettre d’huile dans les armes ou que 4 gouttes suffisent…je renvoie ceux que cela intéresse au Chapitre 13 de mon livre, disponible sur ce même site

Ce type de mémo est un retour direct d’une pratique en vogue pendant la Seconde Guerre mondiale en URSS : celle de la visite des concepteurs de matériel sur le front et de l’échange avec les soldats. La majorité des concepteurs d’armes portatives Soviétiques sacrifieront à la pratique. D.N. Bolotin y voit un avantage double : celui d’apporter une meilleure connaissance à leur matériel, mais aussi de développer l’affect du soldat pour son armement. Les deux choses sont en effet de prime importance : connaissance et attention au matériel disponible pour le combat…qui est toujours le meilleur qu’on puisse avoir, puisqu’on n’en pas d’autre ! Mais même les choses les plus élémentaires se perdent…il ne faudrait pas trop passer de temps à la formation n’est-ce pas ? Ce sont des « équivalents temps pleins » …je n’ai que trop entendu ce genre d’âneries dans la bouche de cadres de l’administration Française…mais fort heureusement, pas partout ! Ne jetons pas le bébé avec l’eau du bain…mais restons critiques !

La production s’envola au cours de la guerre : en 1941, 17 888 PTRD et 77 PTRS furent produits, en 1942, 184 400 PTRD et 63 308 PTRS ! Dans cette recherche de productivité, ces armes bénéficièrent d’une nouvelle méthode de rayage de canon développée pour l’URSS par Mikhail Stepanovitch Lazarev et Serguey Ananyevitch Chernichkin à Kovrov : l’olivage. En mettant bout-à-bout tous les efforts entrepris pour réduire le temps de production du PTRS-41, entre 1941 et l’automne 1943, le temps de production fut ramené à 52,6 % du temps de production initial. À partir de 1943, la demande de l’Armée Rouge était satisfaite : chaque régiment pouvait compter sur 54 fusils antichars. Think Different.

Une mise en œuvre presque classique

Extérieurement, les commandes de l’arme paraissent classiques. Si on retrouve donc un levier d’armement solidaire du transporteur de culasse sur le côté droit, l’approvisionnement de l’arme sort quelque peu des sentiers battus. En effet, l’arme est (ou du moins, peut être) alimentée par un clip de 5 cartouches qui s’introduit…par le bas de l’arme (Photos 12 et 13). Il est donc nécessaire d’ouvrir le bas de magasin (opération généralement réservée sur d’autres armes au déchargement !) pour positionner le clip, puis refermer le couvercle. Un large verrou est donc positionné à l’arrière de la trappe du magasin dans ce but. L’opération n’est clairement pas d’une ergonomie optimale : d’une part, elle est clairement difficilement réalisable par le tireur lui-même (même si le manuel réglementaire présente la chose), mais surtout elle exige une garde au sol non négligeable ou de pencher le fusil sur un côté (chose que le bipied autorise). Certes, avec de l’habitude, on se fait à tout…mais clairement, ce dessin ne nous parait pas des mieux pensé. À deux, la chose est moins complexe, mais pas optimale… Comme évoqué plus haut, il est affirmé par D.N. Bolotin que ce système développé en urgence avait comme vocation première d’alléger l’arme, ce qui est peut-être vrai si l’on considère que l’équipe doit porter plusieurs chargeurs. À notre sens, il a sans doute aussi (surtout ?) vocation à simplifier et fiabiliser l’arme à un moment où la production de chargeurs interchangeables n’était pas forcément une évidence sur ce type d’armement. Même sur le SVT-40, il s’agit plus d’un magasin amovible que d’un chargeur interchangeable. Autre élément perturbant, le clip a un sens d’introduction ! Là aussi, ce n’est pas optimal et l’utilisateur paye sans doute l’urgence du développement de l’arme. Pour faire un clip sans sens d’introduction, il aurait sans doute été nécessaire de retenir un chiffre pair pour sa capacité…donc de diminuer à 4 ou porter à 6. Contrairement au fusil Grand, le clip ne s’éjecte pas en fin de tir : il sera donc nécessaire de le retirer en ouvrant le magasin. Heureusement, l’utilisation du clip n’est pas fondamentalement nécessaire : les lèvres sont portées par le boîtier de culasse (Photo 14). On peut donc alimenter les cartouches une à une dans le magasin comme sur la majorité des fusils à répétition…on se demande même si la chose n’est pas préférable ! La trappe retrouve alors sa fonction plus classique de « déchargement ».

Sans doute par souci de sécurité pour le binôme, l’ouverture du magasin n’est possible que si l’ensemble mobile est à l’arrière. Pour ce faire, le verrou du magasin est mécaniquement assujetti à la position de l’arrêtoir de culasse (qui fait aussi office de commande de la sécurité à la fermeture comme nous le verrons plus loin).

Donc pour approvisionner, on tire l’ensemble mobile à l’arrière jusqu’à qu’il soit accroché sur l’arrêtoir de culasse, puis on ouvre le magasin, on introduit le clip et on referme le magasin en prenant soin que le clip ne ressorte pas. Aucun dispositif ne retient le clip dans l’arme : la simple friction du clip sur la carcasse assure en principe cette fonction. Une fois de plus, ce n’est pas optimal ! Le clip introduit, on tire légèrement l’ensemble mobile vers l’arrière afin de libérer l’arrêtoir de culasse, puis on laisse l’ensemble mobile revenir en position de fermeture sous l’action de l’ensemble récupérateur. Comme toujours, on ne raccompagne pas l’ensemble mobile au risque de générer une fermeture incomplète : l’effort pour prélever la munition du magasin est considérable.

L’arme est prête à faire feu. Elle dispose d’une sûreté sur le côté droit : il s’agit d’un large levier qui peut se positionner à l’arrière (après un mouvement d’environ 180° – Photo 15). Il masque alors l’accès à la détente par le côté droit (donc pour un tireur droitier…mais le tireur gaucher sera aussi gêné dans une moindre mesure) tout en immobilisant le chien…en entravant la tige-guide de son ressort qui traverse la tête du chien (Photo 16) ! Original, mais efficace.

Comme déjà évoqué, ce qui surprend lors du tir avec cette arme, c’est le mouvement de la détente. Celle-ci ne translate pas vers l’arrière (comme sur Colt 1911 ou un TT-33), ni ne bascule vers le bas (comme sur la majorité des autres mécanismes), non elle bascule par le haut. Son pivot est donc vers le bas. Cette disposition a sans doute été adoptée pour permettre de simplifier la réalisation de la platine. Rien de rédhibitoire en soi, c’est une question d’habitude.

Les organes de visée sont classiques chez les Soviétiques de cette époque : un cran de mire disposé sur une planchette de hausse, graduée de 400 à 1500 m (Photo 17). Le guidon est protégé par un tunnel (Photo 18). Il est réglable en direction, mais pas en hauteur comme sur d’autres armes Soviétiques : le niveau de précision de cette arme, quoiqu’excellent dans son domaine comme nous le verrons au tir, n’exige pas un réglage aussi fin que celui du combat d’infanterie. La cible est plus large, même en prenant en compte des parties spécifiques du véhicule.

L’arme est montée sur un bipied repliable aux larges semelles, ainsi compatible avec les sols meubles (boue, neige – Photos 19 et 20). Si ce bipied n’est pas réglable, on notera cependant qu’à l’usage, il se montre bien plus pratique que l’infâme bipod du fusil-mitrailleur DP !

Pour le confort de tir, l’arme peut compter sur : son poids (20,93 Kg, tout de même), un frein de bouche merveilleusement dessiné (Simonov avait déjà travaillé le sujet depuis l’AVS-36) et une crosse dotée d’une plaque de couche fortement rembourrée (Photos 21 à 23). On note que le manuel réglementaire présente une épaulière…que nous n’avons jamais vue à titre personnel ! Le dessin du frein de bouche est très soigné : efficace, il ne soulève que « peu » de poussière au sol comparé à d’autres armes et pour une arme de ce calibre. De plus, il épargne plutôt le tireur de l’effet de souffle…par contre, il n’épargne pas les personnes à côté du tireur (Photo 24). Mais soyons clairs, l’effet de souffle est tout de même éprouvant pour le tireur, notamment lors de sessions prolongées. Pour l’observateur d’une démonstration, le mieux est de se positionner dans les 6 heures du tireur : c’est alors très supportable.

Pour le transport, l’arme dispose d’une poignée amovible (simplement vérrouillée par un ressort plat) : elle peut se positionner en deux points (Photos 25 et 26) :

  1. Sur le centre de gravité de l’arme (à l’avant de la hausse), ce qui permet de déplacer (et de positionner) l’arme seule.
  2. Au niveau du guidon : ce qui permet de transporter l’arme à deux : un par la poignée de transport, l’autre par la crosse.

Et le dispositif est plutôt concluant : à deux l’arme se déplace rapidement et sans trop de difficultés.

Enfin, l’arme peut être instantanément démontée en deux fardeaux : une forte clavette est disposée à l’avant du boîtier de culasse (Photos 27 et 28). Son retrait est extrêmement simple (on appuie sur son bouton de verrouillage et on la tracte). Paradoxalement, l’arme n’est sans doute pas plus facile à transporter à pied dans cette configuration : l’emploi de la poignée est nettement plus commode. Par contre, on devine aisément l’avantage logistique de ne pas avoir à disposer de caisses de plus de 2 mètres pour le conditionnement et l’acheminement de l’arme depuis l’usine ou l’entrepôt…cela rentre même dans une SEAT Ibiza…De même, le nettoyage, notamment de la chambre qui est un point sensible, est grandement simplifié par cette possibilité (Photo 29).

Une mécanique simple, préfigurant le SKS-45

Pour son fusil antichar semi-automatique, S.G. Simonov reprit donc le principe moteur de son fusil semi-automatique de calibre 7,62×54 mm R de 1938. Il s’agit d’un prototype réalisé dans le cadre du concours qui vit l’adoption du SVT-38. On retrouve donc un emprunt de gaz à piston non attelé et à course courte associés à une culasse béquille (Photos 30 et 31). L’emprunt de gaz dispose d’un régulateur en admission à trois positions, qui permettent d’adapter l’arme à son milieu d’emploi (Photo 32). L’éjecteur, massif, est usiné directement dans le boîtier de culasse : la puissance de l’éjection est donc tributaire de la vitesse de cycle, donc de la position du régulateur d’emprunt de gaz (Photo 33). L’extracteur est porté par la culasse. Positionné sur le côté droit, il est talonné par le transporteur de culasse qui bride sa course en fonction de la position de l’ensemble mobile. Verrouillé, il est immobilisé, déverrouillé, il dispose de la course nécessaire pour « sauter » le culot de la cartouche lors de la fermeture (visible sur la Photo 30). L’alimentation n’est pas contrôlée : cette disposition est d’ailleurs peu présente sur les armes Soviétiques à l’exception notable du TT-33. De même, l’absence de verrouillage rotatif interdit le recourt à l’extraction primaire, chose qui aurait pourtant été bien utile sur une telle arme.

Le système de mise à feu est monté sur une platine amovible (Photo 34). Il fait appel à un classique chien à mouvement circulaire. Il est assujetti à une gâchette de sécurité travaillant à sa base. De façon habile (car mobilisant peu de pièces), cette gâchette de sécurité réalise deux fonctions :

  • Sécurité à la fermeture. Pour ce faire, elle est actionnée par l’arrêtoir de culasse dont l’extrémité supérieure fait saillie dans la partie inférieure de la mortaise de verrouillage. Cette vraie sécurité à la fermeture est donc commandée par l’affaissement de la partie arrière de la culasse lors du verrouillage : elle doit être maintenue en position basse par la culasse verrouillée pour que le chien soit libre. On note que ce système de sécurité repose sur l’utilisation de deux crans sur la gâchette commandée : en cas de pression de la détente une première fois sans verrouillage du mécanisme, le chien est maintenu par la gâchette de sécurité entre les deux crans de la gâchette commandée (Photos 35 et 36). Par conséquent, lorsque la culasse est verrouillée, elle libère le chien qui vient s’accrocher sur le second cran de gâchette commandée. Ainsi, le système possède une faiblesse : si la culasse est déverrouillée alors que le chien est accroché par le second cran de la gâchette commandée, alors il est possible de déclencher l’abattement du chien. Fort heureusement, même si cette manipulation – à l’occurrence faible d’un point de vue concret, on ne « tap-rack-bang » pas une telle arme…du moins je l’espère pour l’utilisateur – advenait, le chien s’abat, en fonction de la course de l’ensemble mobile, soit sur le classique « arrondi » de culasse, soit sur le transporteur de culasse. La chose assure ainsi également que la culasse est en position de verrouillage avant que le percuteur ne soit accessible. Cependant, conscient de cette « faiblesse », Simonov modifiera le système sur le SKS-45 : cette sécurité à la fermeture travaillera alors sur la barrette de connexion.
  • Sécurité du crochet de magasin. En réalité, la chose inverse ici la fonction : au lieu d’interdire le tir, il est donc impossible d’ouvrir le magasin (car le crochet ne peut pas reculer) si la culasse est en batterie. Pour approvisionner l’arme, il est donc impératif de mettre l’ensemble mobile à l’arrière pour libérer le mouvement de l’arrêtoir de culasse.

La gâchette commandée (i.e. celle qui est actionnée par la détente), qui travaille sur la crête du chien, est à « tiroir » (i.e. elle coulisse au lieu de pivoter) et dispose donc de deux crans pour s’accommoder du fonctionnement de la gâchette de sécurité. Elle est mise en œuvre par une barre de transmission qui est débrayée vers le bas par la crête du chien lors du réarmement : séparant la détente de la gâchette, le tir semi-automatique est ainsi créé.

Le percuteur, porté par la culasse, est de type frappé / appuyé. Il dispose d’un fort ressort de rappel, qui associé à la forme particulièrement aplanie de sa pointe est destiné à éviter les départs sur l’inertie de la fermeture (le « slam-fire » des Anglophones – Photo 37). En effet, la crainte est justifiée : le percuteur est massif (24 g) et doit donc disposer d’une inertie non négligeable à la fermeture. Par ailleurs, le percuteur est usiné de façon à entrer en butée sur le transporteur de culasse lorsque l’ensemble mobile est en position déverrouillée : il reproduit le plan incliné commandant le verrouillage / déverrouillage (visible sur la Photo 30).

Le système d’alimentation est donc constitué d’une large cavité destinée à accueillir le clip, fermé par une large trappe en acier forgé et usiné ! Une pièce pour le moins imposante qui nous fait relativiser l’idée que ceci aurait permis « d’alléger l’arme ». Comme déjà évoqué, c’est le boîtier de culasse qui dispose des lèvres. La planchette élévatrice, articulée sur une longue tige, trouve sa force motrice sur un court ressort en spirale disposé à la base de la tige (Photo 38).  Cette disposition – qui comme de nombreuses dispositions du PTRS-41 – sera reproduite telle quelle sur le SKS-45 n’est pas sans nous interroger (un article est à venir sur le SKS-45). Son désavantage : elle positionne le ressort en position mécaniquement défavorable dans son rôle (à la base du pivot dans un système de levier) …mais elle présente aussi des avantages. Le ressort est court (donc peu couteux) et bien protégé (donc peu sensible à l’encrassement). L’un dans l’autre, avec un ressort d’une puissance élevé, ce choix peut paraitre rationnel…mais surprenant.

La construction de l’arme fait principalement appel à de l’usinage et contrairement à l’arme de V.A. Degtyarev, à de nombreuses opérations de fraisage et peu de tournage (canon mis à part, évidemment), le tout étant très « parallélépipédique ». L’ensemble est réalisé, de façon habituelle en URSS, avec qualité, mais sans ostentation. Les finitions sont crues là où cela n’a pas d’importance…et bonnes là où cela compte. Think Different. Les matériaux paraissent de qualité : malgré son âge et les coups tirés, peu de traces d’usure ! L’ensemble des pièces sont bronzées au bain, à l’exception de l’ensemble mobile qui est « poli-blanc », quelque chose de classique pour les pièces mobiles. La couleur aubergine du canon ? C’est classique lors du bronzage de pièce en acier fortement allié…ce qui semble être le cas de ce canon !

Au tir

Pour commencer, la vidéo de la chaîne « Le Feu aux Poudres », une excellente entrée en matière pour le tir avec cette arme :

Alors, soyons clairs : à titre personnel, j’ai horreur de tirer les armes de ce type, que ce soit en 12,7×99 ou en 14,5×114, pas plus que je n’aime tirer un calibre 12 léger… Non, je ne suis pas masochiste. Outre le problème du recul (on va en reparler), le volume sonore (même avec protection) et l’effet de souffle me sont désagréables et me cassent le plaisir du tir. Concernant le recul, la chose est plutôt surprenante, car si le fusil recule profondément, il ne le fait pas vraiment violemment : le poids de l’arme, le frein de bouche et la plaque de couche rembourrée sont à l’oeuvre. Ainsi, il tord votre corps plus qu’il ne le frappe… (il y a une petite anecdote en fin d’article pour les plus gourmands). Mais la chose reste supportable et les tirs s’enchainent finalement plutôt facilement pour ceux qui aiment ça…ou ceux qui n’ont pas le choix.

Car bien évidemment, la performance de la bête n’est intéressante que d’un point de vue militaire : on ne fait pas du tir sportif. Et là, clairement, c’est bluffant. Nous avons eu le loisir de superviser des essais / démonstrations de l’arme sur plusieurs sessions de tir (dont la vidéo ci-dessous est un medley de séquence) avec plusieurs tireurs à des distances pouvant atteindre plus de 1200 m. Le premier constat est simple : la mise en œuvre de l’arme est plutôt simple et rapide…pourvu qu’on soit deux derrière la machine. Que ce soit pour le transport, la mise en place, le chargement ou la résolution des incidents de tir, être seul confère, de notre point de vue, au suicide opérationnel. Mais à deux, tout se déroule de façon fluide : le tireur étant soulagé des aspects « logistiques », il peut se consacrer à sa besogne. Et le binôme n’est pas en reste dans ce travail : pourvoyeur, chargeur et observateur…essentiel. Le rôle d’observateur est primordial : l’arme bouge trop pour permettre au tireur de voir son tir. Mais le résultat est sans appel : même avec peu de pratique de l’arme, l’efficacité est au rendez-vous. La puissance de feu (la vraie, celle qui fait un coup / un but de façon rapide et répétée) est bien là : sur une cible de la taille d’un véhicule, les tirs sont aisément au but…jusqu’à 1275 m qui est la distance maximale à laquelle nous avons tiré…sur un AMX-13 VTT présentant son « cul » ! À cette distance, l’épave de char n’est pas percée, évidemment…on est au-delà des capacités pratiques de la munition sur ce type de véhicule…mais on est tout de même en cible ! À 400 m, une cible de taille plus restreinte (ici une plaque d’acier d’une taille de 51 x 31 cm) est aisément atteinte après quelques essais, ce qui démontre qu’il est même possible d’atteindre une zone du véhicule en particulier (Photo 39). On repense ici que les distances d’emploi préconisées étaient alors de 250-300 m maximum. Les probabilités d’atteinte sont donc très élevées…sans doute bien plus élevées qu’avec un lance-roquette, et ce, même sur cible mobile. Les organes de visées sont nets, et le départ, comme à l’accoutumée chez les Soviétiques, filant (Photo 40).

Concernant l’efficacité terminale, nous nous sommes seulement livrés à des démonstrations et non des tests balistiques poussés. Cependant, nous avons assisté à des tests comparatifs entre les calibres 12,7×108 mm (munition B-32), 14,5×114 mm (munition B-32) et 23×152 mm B (munition BZT – perforante-incendiaire-traçante) …et dans certaines situations, la 14,5×114 mm est la munition la plus efficace en termes de perforation ! Certaines situations, car en matière de balistique terminale, il n’y a généralement pas « une vérité », mais plutôt « des circonstances ».

De notre côté, la plaque d’acier d’environ 30 mm d’épaisseur a été percée à 400 m sans aucune difficulté par des munitions de type B-32 de fabrication Chinoise et Soviétique. Si la composition exacte de la plaque d’acier ne nous est pas connue, il paraît vraisemblable qu’il s’agisse d’une sorte d’Hardnox.

Alors évidemment, face à l’emploi de cette arme fabriquée en 1944 (et pas toujours entretenue comme il se doit…), nous avons rencontré plusieurs incidents de tir. Ceci était principalement lié au mauvais état de la chambre (oxydation du fond de la chambre ayant entraîné des collages d’étui pouvant générer des défauts d’extraction complets, mais aussi des ruptures de culot – Photo 41 !) et à la faiblesse des ressorts (défaut de percussion, mauvais fonctionnement de l’arrêtoir de culasse). Mais la chose fut un bien pour un mal : cela nous a permis d’expérimenter les méthodes de résolution des incidents de tir en réel, avec notamment l’emploi de l’extracteur d’étui rompu (réglementaire…et pas pour rien !) …et la baguette en acier réglementaire, absolument nécessaire pour retirer l’étui dont le bourrelet a été arraché par l’extracteur (Photo 42). Alors, soyons clairs, pour l’emploi de l’extracteur d’étui rompu, une fois celui-ci positionné en chambre, l’ouverture de l’ensemble mobile se fait…, en position allongée, à coups de pied sur le levier d’armement ! Une arme collective… Enfin, rappelons ici que face à un non-départ de coup de feu, il convient d’attendre un long moment en position de tir afin de se prémunir des conséquences négatives d’un long feu. Le temps d’attente est variable selon les doctrines, pouvant atteindre 2 minutes et plus. Ce qui paraît long derrière le fusil, mais n’est rien à l’échelle d’une vie. Les risques d’un long feu avec ce type d’arme ? Eh bien, très simplement : la mort. Imaginez simplement que vous avez déverrouillé le mécanisme et que le coup part… Ça vaut la peine d’attendre ! Et ce type d’accident existe, ne serait-ce qu’avec de la 12,7×99 mm…avec des morts, des vrais.

Démontage et entretien

Comme sa descendance directe, le SKS-45, le démontage et l’entretien du PTRS-41 sont excessivement simples (vidéo disponible en fin de paragraphe).

Après avoir vérifié que l’arme est vide, on procède donc comme suit :

  1. On positionne l’ensemble mobile vers l’avant.
  2. On retire la clavette d’assemblage du canon.

On se retrouve ainsi avec deux sous-ensembles : le canon et le boîtier de culasse.

Pour le groupe canon, on procède comme suivant :

  1. Pivoter la clef de la buse de gaz vers l’avant, puis la retirer par le côté droit.
  2. À l’aide d’un outil adéquat, enfoncer la buse des gaz dans le tube jusqu’à ce qu’elle dépasse l’extrémité arrière de la frette et la maintenir dans cette position. Dès lors, il est possible de soulever la partie avant du tube d’emprunt de gaz en prenant soin de ne pas éjecter la buse et le piston dès que ceux-ci ne seront plus contraints par la frette.
  3. Retirer par l’avant du tube, dans l’ordre, la buse, le piston et la tringle.
  4. Dégager la partie arrière du tube : extraire alors le poussoir du transporteur et son ressort de rappel.

Le groupe canon est démonté.

Pour le groupe boîtier de culasse, on procède comme suit :

  1. Ensemble mobile à l’avant, pivoter à 90° dans le sens anti-horaire la clef de démontage disposée sur le flanc droit de la partie arrière du boîtier, puis l’extraire de l’arme.
  2. Soulever l’arrière du couvre-culasse, et tout en l’accompagnant, le retirer de l’arme.
  3. Si l’ensemble récupérateur n’est pas venu avec le couvre-culasse, le retirer du transporteur de culasse. Il est constitué de trois éléments : deux ressorts identiques et une tige-guide centrale. Ces éléments sont simplement emboités.
  4. Tracter l’ensemble mobile vers l’arrière du boîtier.
  5. Sortir le transporteur de culasse, puis la culasse elle-même.

Pour un démontage un peu plus poussé, la dépose des systèmes de mise à feu et d’alimentation peut être réalisée comme suivant :

  1. À l’aide d’un tournevis (il y en a un dans l’unité collective), dévisser la vis présente à l’arrière de la partie inférieure du boîtier. Celle-ci dispose d’une particularité : un ressort d’arrêt nécessite d’être refoulé à la mise en place du tournevis dans la fente. Cette disposition permet d’éviter un desserrage intempestif au tir (Photo 43).
  2. Une fois la vis retirée, abaisser la poignée pistolet puis tracter la platine vers l’arrière de l’arme. En sortant la platine de l’arme, le système d’alimentation s’ouvre et peut être extrait du boîtier de culasse.
  3. Sur la platine, la flasque de protection peut être retirée par le haut. Le retrait de cette flasque donne accès aux différents axes du système de mise à feu. On note que sans poursuivre le démontage du système de mise à feu, l’accessibilité pour le nettoyage est ici excellente.

On arrive ici au terme d’un démontage « sommaire », plutôt poussé, qui offre une excellente accessibilité pour le nettoyage (Photo 44).

Les plus gourmands pourront ajouter le démontage de la platine,  de la culasse et de l’arrêtoir de culasse dans le but de réaliser un démontage « avancé ».

Pour la platine :

  1. Positionner le chien à l’abattu. Il faut pour se faire : presser la détente une première fois, puis presser la gâchette de sécurité et enfin presser la détente à nouveau tout en accompagnant la décompression du chien. Attention, ça pousse un peu…
  2. En maintenant la pression sur le sommet du chien, chasser son axe. Le chien sort avec son ressort et sa tige-guide.
  3. Chasser l’axe de la gâchette de sécurité : la pièce peut être retirée vers le haut de la platine.
  4. Extraire le ressort de la gâchette commandée (qui actionne également la sécurité à la fermeture).
  5. Refouler la gâchette commandée vers l’avant de la platine : elle peut alors sortir de son logement.
  6. Chasser l’axe de la détente. Celle-ci peut alors être retirée du corps de platine.
  7. Sur la détente, chasser l’axe de la barrette de transmission. Celle-ci peut alors être retirée de la détente.
  8. Sur la détente, chasser l’entretoise de l’axe de la détente, qui maintient le ressort de rappel de détente / barrette de transmission en position dans la détente.
  9. Chasser l’axe de pivot de la platine (qui retient le crochet du magasin), puis retirer le crochet de magasin et son ressort.
  10. Enfin, sur la flasque de protection, il est possible de retirer la sûreté de la façon suivante : outre-passer la position « tir » (vers l’avant) jusqu’à faire correspondre la tige de maintien présente sur l’axe de la sûreté en face de l’ouverture de la flasque, puis l’extraire par le côté droit.

Pour la culasse :

  1. En poussant l’extracteur dans son logement, pivoter sa partie avant vers l’extérieur : l’extracteur sort de son logement accompagné de son ressort.
  2. En maintenant le talon du percuteur sous pression, extraire la goupille de percuteur (qui est épaulée) de gauche vers la droite. Il n’est pas nécessaire de l’extraire complétement : il faut simplement la repousser suffisamment pour pouvoir extraire le percuteur et son ressort.

Enfin, pour l’arrêtoir de culasse :

  1. Retirer la goupille de l’arrêtoir de culasse.
  2. Retirer l’arrêtoir culasse de son logement en le faisant coulisser vers le bas.
  3. Retirer le ressort de l’arrêtoir de culasse.

Le démontage de l’arme peut être considéré comme « complet » à l’échelle de l’utilisateur. Le remontage se fait dans le sens inverse (Photo 45). Aucune difficulté particulière, finalement peu de pièces, aucune pièce de faible dimension ou fragile : l’arme est donc particulièrement adaptée à sa destination. Le système d’emprunt de gaz à piston non attelé fait des merveilles en matière de compartimentations de l’encrassement : le boitier de culasse se contamine très peu par le tir.

En conclusion

Le PTRS-41 reste, encore de nos jours une arme aux capacités impressionnantes qui préfigure parmi le fusil antimatériel moderne. Évidemment, dans la lutte antichar, ces capacités de perforation ne peuvent clairement pas rivaliser avec la (ou les !) charge-creuse(s) portée(s) par un obus, une roquette ou un missile. Mais l’arme présente des capacités qui encore aujourd’hui justifient son emploi sporadique sur les théâtres d’opérations, où nécessité fait loi. Au final, compte tenu de son niveau de puissance de feu, l’arme est maniable, aisée à déployer et à camoufler. Ainsi, si elle se montrera bien impuissante face à un « MBT » moderne, bien servie, elle constitue toujours une menace pour bon nombre de véhicules légers et bon nombre d’abris faiblement fortifiés. D’un point de vue technique, elle préfigure une arme qui marquera l’Union Soviétique presque autant que la Kalashnikov : le SKS-45. Mais cela est une autre histoire…

Arnaud Lamothe

Ce travail est en libre accès : n’oubliez pas que le seul moyen de nous soutenir est de partager ce contenu et de vous abonner. Outre l’accès à la totalité de notre site, l’abonnement est un magnifique moyen de soutenir notre démarche, de passionnés à passionnés !

Bibliographie choisie :

« Soviet small-arms and ammunition », David Naumovich Bolotin, Finnish Arms Museum Foundation, 1995.

Munitions militaires russes pour armes légères 1868-2008 », Philippe Regenstreif, Crépin-Leblond, 2007.

Pour les manuels réglementaires (consultés au 03/04/2023) :

http://nastavleniya.ru/

Pour le recoupement de certaines informations :

https://modernfirearms.net/en

Évidemment, pour différentes sources numériques notamment liées aux véhicules ; différentes pages Wikipédia (consultées de Mars à Avril 2023).

Il reste des lecteurs ? Prêt pour l’anecdote de l’ostéopathe ?

Comme énoncé précédemment, le tir de ce genre de machine n’est pas ma passion. J’ai donc essayé la chose, pour la première et dernière fois en 2015. J’ai tiré deux cartouches…et laissé ma place à des camarades plus gourmands que moi de ce genre d’aventures (certains en ont tiré plusieurs dizaines de coups au cours d’une même séance…gourmands je vous dis). Quelques temps plus tard, sans faire immédiatement le lien, des douleurs sont progressivement apparues dans mon avant-bras et ma main gauche. La chose empirant avec le temps (perte de préhension, douleurs aiguës me réveillant la nuit…), je me dirigeais naturellement vers mon médecin, suspectant un début du syndrome du canal carpien, chose existante dans ma famille (oui, aujourd’hui, je vous raconte ma vie…même si vous vous en foutez !). Une batterie de tests s’en suivit, dont une IRM cervicale et une électromyographie (les connaisseurs apprécieront) sans qu’aucun diagnostique ne puisse être posé. Face à la douleur et cédant aux instances de ma compagne (une Sainte à n’en point douter…elle me supporte), je finis par aller voir une Ostéopathe qu’un ami (celui-là même qui acquit le fusil en question…curieuse coïncidence !) m’avait conseillé. Je dois avouer que j’étais sceptique. Lors de la consultation, la chose était pour elle, évidente : j’avais subi un « choc » violent qui avait eu une incidence sur le haut de ma colonne vertébrale et expliquait sans l’ombre d’un doute mes douleurs. Après m’avoir « manipulé » (crack !), elle me donna rendez-vous 2 semaines plus tard pour une seconde séance (gratuitement !), pour parfaire le travail, trop « sévère » pour être traité en une seule séance. Cette histoire de « choc » me travaillant au cours de la séance, je cherchais quelle pouvait en être l’origine…mes activités physiques n’étant pas spécialement violentes, outre du coupage de bois… Mais le souvenir du tir me revint. Et lors de la seconde séance d’ostéopathie, je présentais une vidéo du tir à ma sorcière…et effectivement, le dos se « tord » lors du tir, notamment si on tend à avoir une position trop anguleuse avec l’arme. Pour elle, le lien était évident. Eh oui, les séances d’ostéopathie (re-crack) ont fait disparaitre les douleurs…depuis, la visite chez ma praticienne de talent est régulière ! Évidemment, plus de tir au PTRS-41 pour Nono (c’est moi !) : le rôle d’assistant me convient très bien !

    Ne manquez plus rien, vous serez averti par mail de la sortie de nos articles !

    *Nous aussi nous détestons les spams

    Article précédent
    Arnaud Lamothe

    Expert près la Cour d'Appel de Limoges, ancien contrôleur des services techniques du ministère de l'Intérieur, cofondateur du site LAI Publication, Arnaud est un spécialiste des armes de guerre de petit calibre. Auteur d'articles, il désire au travers de ce site partager sa passion et ses connaissances pour ces sujets.

    error: Content is protected !!