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Le choix des mots : réflexion sur la sémantique en matière de catégorisation des armes à feu

Voilà longtemps que nous constatons, dans de nombreuses conversations, sur les réseaux et même dans les médias que la « catégorisation » des armes est prisonnière d’une sémantique bien souvent dépourvue de rationalité au profit de formules « chocs », qu’elles soient choisies à des fins idéologiques ou mercantiles… Réfléchissons un peu à tout ça.

Circonscrire un peu le problème

Il est nécessaire de comprendre ici de façon préalable que nous n’avons pas tous le même niveau d’instruction sur les armes à feu. Il ne s’agit en aucun cas d’un jugement de valeur, mais simplement d’un constat. Vous qui me lisez ici, avez sans doute un attrait significatif pour la matière (ou êtes particulièrement curieux et ouvert d’esprit, et je vous en félicite tout autant) : les mots et les concepts liés aux armes vous sont donc familiers. Mais si vous faites le test de discuter de ces sujets avec des personnes « ordinairement » étrangères au monde des armes, on constate rapidement qu’un sujet finalement « simple » (on est très loin de la physique quantique…), est sacrément confus dans l’esprit du grand public. Poser cette simple question « Quelle est la spécificité d’un révolver ? ». La réponse est dans la question, et, pourtant un grand nombre de personnes n’iront pas au-delà de la définition d’une arme de poing. Même professionnellement, certains publics quotidiennement au contact avec les armes sont parfois étonnamment perdus dans tout un dédale de considérations. Et pour cause : l’arme est bien souvent un outil parmi tant d’autres à leurs dispositions, nécessaire pour accomplir leurs missions et pas un objet de passion et d’étude (voire de fascination…).

C’est qu’il s’agit en réalité d’une thématique objet de peu d’instruction. Pour la population Française, la chose s’est notamment accentuée depuis la fin du service militaire. Pire, elle est franchement diabolisée, de façon décomplexée et irrationnelle : qu’on le veuille ou non, les armes font partie de l’Histoire de l’Humanité depuis la nuit des temps…et, vraisemblablement (et quelque part, convenons-en, malheureusement) pour toujours. Raison de plus de ne pas abandonner ce terrain à des personnes haineuses et fanatisées de tous bords (l’appât du gain étant également une forme de fanatisme). En France, même dans les institutions qui emploient ces « outils », l’instruction est souvent circonscrite au strict minimum utilitaire, parfois dispensée par du personnel, parfois peu formé, souvent tiraillé entre plusieurs fonctions et très généralement dépourvu de moyen ! Bien évidemment, il existe des instructeurs passionnés et passionnants. Une pensée particulière pour eux, quelle que soit leur « chapelle ». Enfin, cette thématique est sujet à des fantasmes, de la peur et des frustrations…le tout avec une grosse pincée de vision hollywoodienne.

Ainsi, il est plutôt aisé de semer la confusion dans les esprits avec des formules « chocs », parfois complétement décorrélées de sens, et dont le but n’est bien souvent pas celui affiché par « le choix des mots ».

Alors, non, l’objet de cet article ne sera pas d’apporter une instruction au grand public : tout notre site (abonnez-vous !) est en réalité dédié à cette mission, et en particulier, notre livre « Petit Guide de l’Armement », en lien ici. Non, il s’agit d’apporter ici une réflexion (sans jugement, mais avec mes pensées sur le sujet) sur le choix des mots et des expressions liés à une prétendue « catégorisation » des armes (i.e. un regroupement par « famille ») et ce pour bien comprendre « de quoi qu’on parle ». Aussi, lorsque nous employons ici le terme « catégorisation », il est nécessaire de comprendre que nous ne nous inscrivons pas dans un cadre réglementaire, qui emploie des définitions propres. En France, ces définitions sont contenues en partie dans l’article R311-1 du Code de la Sécurité Intérieure. Enfin, comme bien souvent en matière de sémantique, le sens d’une expression est une question de point de vue. Par conséquent, nous pourrions convenir…que personne n’a fondamentalement raison ou tort ! Mais tout de même, il doit être possible d’éviter certains écueils.

Enfin, le point de départ de ce travail se concentrera sur la langue Française (mais pas uniquement), celle-ci étant ma langue natale. Pour la version traduite en Anglais, le propos sera le même, offrant ainsi au lecteur anglophone, un voyage linguistique en prime d’une réflexion !

Un peu de contextualisation historique

Jusqu’au milieu du XIXe siècle la sémantique de catégorisation de l’armement portatif a été plutôt limitée. La raison en était simple : la quasi-totalité des armes était « à un coup par canon » et partageait une balistique finalement proche. Si l’évolution des systèmes de mise à feu eut des conséquences importantes tant d’un point de vue industriel que pratique, ceci ne changeait finalement que peu de choses sur les performances des armes d’un point de vue balistique (interne, externe et terminale) …mais surtout sur l’action principale du chargement : l’introduction du projectile par la bouche du canon. Ceci conduisait naturellement à un constat : une action répétée de l’arme ne pouvait s’engager qu’à la condition que d’avoir « le temps » de recharger. La chose était dès lors difficilement concevable dans le tumulte des combats rapprochés. De plus, l’emploi de la poudre noire rendait la chose d’autant plus problématique : son faible rendement limitait son efficacité balistique (notamment en comparaison d’arme plus récente) et l’encrassement lié à sa combustion rendait une utilisation répétée complexe. En fonction des situations, l’arme se rapprochait ainsi d’un « dispositif consommable » …qu’on pourra réutiliser plus tard, quand on aura eu le temps de nettoyer et recharger.

En langue Française, il semblerait que la première expression dédiée à une arme à feu portative (c’est-à-dire tenue par l’utilisateur au moment du tir), apparue au XIVe siècle, fut « couleuvrine à main » (Photo 01). Ne confondons pas port et transport : nous laissons ici de côté le cas de « la haquebute »,  terme apparu au XIVe ou XVe siècle (selon les sources) qui désignerait une arme portée par un mur au moment du tir. La couleuvrine à main désigne une arme aujourd’hui fréquemment dénommée « canon à main », une arme à feu chargée par la bouche et généralement disposée au bout d’un long morceau de bois. Elle était mise à feu à la façon des canons d’alors. Il fut suivi de «l’arquebuse » au cours du XVe siècle (Photo 02). Il s’agit alors d’une arme à chargement par la bouche mise à feu à mèche (avec ou sans mécanisme) et plus tard à rouet. On pourrait les qualifier d’armes d’épaule : ces armes possèdent généralement un ersatz de crosse quelque peu éloigné de nos standards actuels (Photo 03). Elles sont fréquemment utilisées depuis une fourche d’appui. À partir du XVIe siècle apparaît le terme « mousquet ». Il désigne alors une arme à chargement par la bouche utilisant un système de mise à feu à mèche, puis à rouet, généralement dotée d’une crosse d’épaulement qui nous est déjà plus familière et dont le canon est sensiblement plus long que l’arquebuse. Il est rapidement complété par le terme « mousqueton », qui désigne une arme plus compacte, notamment destinée à être employée par les cavaliers. Au cours du XVIe siècle, le terme « fusil » est employé pour désigner une arme dont le système de mise à feu est à silex (Photo 04). Il est à noter que le mot « fusil » désigne originellement la pièce sur laquelle on vient « battre la pierre à feu » pour obtenir une étincelle et allumer l’amadou pour faire du feu. Le terme sera employé de façon plus généraliste pour désigner la plupart des armes longues jusqu’à aujourd’hui, et ce, en le décorrélant de la plupart des critères techniques, et notamment, du système de mise à feu à silex qui servit pourtant de base à son baptême. Il sera complété à la fin du XVIe siècle par le terme « carabine », qui désigne, à l’instar du mousqueton, une arme plus compacte notamment destinée à la cavalerie. Il est à noter ici que les considérations sur l’encombrement sont des choses qui évolueront avec le temps : le Fusil Semi-Automatique 49/56, long de 1020 mm n’est considéré par personne comme une carabine…alors qu’il est plus court d’une dizaine de centimètres qu’une carabine de chasseur 1853 T ! C’est qu’en réalité, au-delà des critères techniques, c’est bien le public utilisateur qui est alors visé par le terme « carabine ».

Pour les armes de poing, le mot « pistolet » est vraisemblablement apparu au XVIe siècle, désignant alors une arme « courte » à rouet, notamment employée par la cavalerie (Photo 05). Courte…enfin plus courte qu’un mousqueton ou qu’une carabine ! Bien qu’on puisse penser que cela soit le cas, nous n’avons pas clairement établi par nos recherches qu’à l’origine, ces armes furent systématiquement dépourvues de crosse. Cependant, c’est le sens que prendra ce terme dans les siècles qui suivirent pour le demeurer jusqu’à nos jours.

Il n’est pas rare que ces termes soient complétés par un qualificatif précisant la fonction de l’arme : « de rempart », « de Gendarmerie », « de garde de corps », etc. Dès lors, ces armes présentent une ou plusieurs spécificités propres à l’usage particulier mentionné par le qualificatif.

Évidemment, des systèmes plus sophistiqués seront créés çà et là, mais ceux-ci ne marqueront pas réellement l’évolution de l’armement jusqu’au milieu du XIXe siècle. On note cependant un type d’arme qui finira par marquer durablement le paysage armurier : il s’agit des armes à plusieurs chambres disposées sur une pièce en révolution et qui seront nommées, à partir du milieu du XIXe siècle…revolver.

En langue Anglaise, on retrouve des termes similaires : hand-culverin, harquebus, musket, pistol. Cependant, une distinction se crée à partir de la fin du XVIIe siècle dans la langue de Shakespeare : c’est l’utilisation du terme « rifle ». Il s’agit d’une arme au canon rayé, désignant aujourd’hui une arme d’épaule bien que le terme focalise en réalité sur la présence de rayures dans l’arme.  Dans le même esprit, apparaît plus tardivement celui de « shotgun » : une arme originellement destinée à tirer une charge de plusieurs grains de plomb (généralement à canon lisse). Aussi, l’utilisation récurrente de terme « gun », que l’on peut traduire par « arme à feu », mais qui se focalise sur la présence d’un canon, occupe une place bien plus prépondérante que l’expression équivalente en langue Française. À l’inverse, le mot « fusil » n’a pas réellement d’équivalent dans la langue de Shakespeare : le terme « musket » sera ainsi employé jusqu’au XIXe siècle, pour être supplanté par « rifle » et « shotgun » en fonction des armes décrites. Aujourd’hui traduit par un de ces deux termes, on peut souligner que l’acception actuelle du terme « fusil » est très généraliste et ne désigne plus nécessairement une arme à silex. Pour conserver cette notion généraliste, sa traduction en Anglais correspondrait à « long gun ». On aurait cependant tendance à traduire cette dernière expression par « arme d’épaule » : cependant, ces expressions ne se focalisent pas sur les mêmes critères. En bref, en Français, en Anglais, en Allemand comme dans n’importe quelle langue :  « Il faut respecter l’exception culturelle » ! Et nous ne pourrons pas nous intéresser ici à toutes les langues…

À partir du milieu du XIXe siècle, la généralisation du chargement par la culasse puis de la cartouche métallique allaient ouvrir la porte à la multiplication des types d’armes, et notamment au mécanisme de répétition. La répétition est tout d’abord manuelle : arme à verrou, à levier de sous-garde, à pompe… Le révolver lui-même, qui connaît alors son âge d’or, reste à de rares exceptions près, une arme à répétition « manuelle ». Avant la fin du XIXe siècle, cette répétition manuelle sera rapidement complétée par de la répétition semi-automatique et automatique.

On rencontre à cette époque un premier véritable écueil dans les langues de Molière et Shakespeare : il s’agit de l’emploi de l’expression « pistolet automatique » / « automatic pistol » pour désigner une arme… qu’on devrait qualifier aujourd’hui de semi-automatique ! Évidemment, on peut débattre sur la signification du mot « automatique » dans l’expression :

  • S’il désigne l’action de ré-approvisionnement du canon et de réarmement du système de mise à feu, alors, celui-ci est parfaitement adapté.
  • S’il désigne l’action du tir par rafales (comme généralement compris aujourd’hui) …alors non.

On peut supposer que la « confusion » fût possible dans l’esprit des concepteurs d’armes à une époque où l’arme automatique est également balbutiante avec les premières « mitrailleuses » automatiques, qui succèdent aux mitrailleuses « manuelles » (Gatling et De Reffye pour ne parler que des plus connues – Photos 06 et 07). À titre personnel, nous ne pouvons nous empêcher de penser qu’il y avait cependant dans le choix du mot « automatique », des velléités mercantiles plus que techniques. Et c’est bien là que le bât blesse, car d’une petite entorse à la langue, va découler une grande confusion…qui perdure jusqu’à nos jours. Mais nous allons y revenir.

Mitrailleuse, Fusil-mitrailleur, Pistolet-mitrailleur et pistolet rafaleur : une problématique Française ?

Recentrons-nous tout d’abord sur la langue de Molière. Apparu dans la seconde moitié du XIXe siècle, le terme « mitrailleuse » correspond originellement à une arme assez clairement définie : celui d’une arme montée sur un support (véhicule, trépied, affut roulant, traineaux…) destinée à délivrer un tir en rafale à des cadences soutenues. La chose est d’autant plus claire que l’arme est encombrante et unique de par ses spécificités pour l’époque (aucune autre arme ne tirant alors en rafale). Celle-ci, proche de la pièce d’artillerie, est généralement (systématiquement à cette époque ?) dépourvue de crosse d’épaulement. Face au besoin d’une arme plus souple d’emploi (au sens de sa capacité à accompagner les combattants à mesure de leurs manœuvres sur le champ de bataille), le « fusil-mitrailleur » va apparaitre au début du XXe siècle. Là aussi, la chose est originellement assez claire : l’arme, qui a toujours la capacité de tirer en rafale (parfois avec la possibilité de faire du coup par coup), est plus facilement « portative » qu’une mitrailleuse (plus légère et moins encombrante), munie d’une crosse d’épaulement et peut être employée sans affut (et généralement depuis un bipied – Photo 08). À l’usage, il n’est pas rare que les fusils-mitrailleurs soient désignés par le terme « mitrailleuses ». Même l’Armée Française, finira par quelque peu galvauder le terme pour différencier les versions à canon lourd (dénommées « versions mitrailleuses ») des versions à canon léger (dénommées « versions fusils-mitrailleurs ») des AA-52 et AA-NF1.

La fin de la Première Guerre mondiale verra l’apparition du « pistolet-mitrailleur », expression qui trouve son origine dans le « MaschinenPistole » Allemand. La chose peut apparaître de prime abord assez claire dans l’esprit de beaucoup : il s’agirait d’une arme permettant le tir en rafale d’une munition de pistolet. Mais là où la chose devient problématique…et bien c’est que la morphologie de l’arme ainsi décrite ne correspond pas à un « pistolet » mais bien davantage à un « mousqueton » ou une « carabine » : une arme plus courte que le fusil d’infanterie « standard » du moment (Photo 09). Les Italiens ne s’y tromperont d’ailleurs pas en employant l’expression « Moschetto Automatico » (mousqueton automatique) pour désigner leurs premières armes de ce type…avant de se ranger derrière un consensus tacite « dikté » par la Germanie, à qui on attribue généralement la paternité du concept sous sa forme finalement reproduite par tous les protagonistes du grand foutoir mondial…ah oui, aujourd’hui, je dénonce !

De façon quasi concomitante (en réalité, un peu avant le MP-18 Allemand), l’apparition des premiers « vrais pistolets » « réellement automatiques » sera d’ailleurs source d’une nouvelle expression : « le pistolet rafaleur ». Pourtant, nous sommes bien ici en présence d’un pistolet…et bien qui mitraille autant qu’il rafale. D’ailleurs, le premier d’entre eux, à notre connaissance le « Steyr Maschinenpistole M.12 Patrone 16 »…est aussi dénommé « MaschinenPistole » dans la langue de Goethe.

Ainsi, avec « pistolet-mitrailleur », on peut observer ici que nous sommes en présence d’une expression qui désigne bien mal l’objet dont il est question. Comme pour « pistolet automatique », on peut se réfugier dans une interprétation contextuelle à base de « il s’agit ici de désigner le type de munition employé, à savoir, une munition de pistolet ». Mais ceci est en réalité bien plus malhonnête que l’excuse employée pour « pistolet automatique » : depuis le début de cette petite rétrospective chronologique, il n’est fait à aucun moment mention de la puissance des munitions employées ! Une carabine en .22 Long Rifle cesse-t-elle d’être une carabine à cause de la puissance de sa munition, pourtant bien inférieure à celle d’une 9×19 mm ? Non, il faut bien admettre que l’expression « pistolet-mitrailleur » …est intrinsèquement erronée ! En Français, comme en Allemand, en Italien ou en Russe…etc. Par contre, celle employée pour les « pistolets-rafaleurs » est assez rationnelle… mais quid du sélecteur de tir ? Ces armes peuvent généralement également tirer en semi-automatique. Si pour « pistolet automatique » nous suspectons clairement des velléités mercantiles, pour le « MaschinenPistole », nous soupçonnons davantage – au vu du contexte – une absence d’inspiration et de réflexion ! Soulignons au passage, qu’en Français, le terme de « mitraillette », largement tombé en désuétude, mais qui était très employé par nos anciens (parfois également à tort et à travers), était finalement bien meilleur ! Il s’agit d’une arme tirant en rafale plus petite qu’une mitrailleuse…et ça peut coller parfaitement avec les caractéristiques d’un « Pistolet-Mitrailleur ».

Avant de poursuivre cette indispensable rétrospective chronologie, il est nécessaire de faire un crochet par les pays de langue Anglo-Saxonne…car en arrivant à la Second Guerre mondiale, les choses vont véritablement se… « kompliquer » !

« Machine gun » : une problématique Anglo-Saxonne ?

Du côté de la langue de Shakespeare, le terme « Machine Gun » (MG) va initialement s’imposer pour désigner tout type d’arme automatique. Aujourd’hui encore, il désigne pour le BATFE, toute arme tirant en rafale : l’expression fréquemment rencontrée dans ce contexte est « transferable machine gun », car désignant des armes automatiques pouvant être légalement commercialisées. Pour les personnes étrangères au commerce d’armes automatiques aux États-Unis, cherchez cette expression sur internet…et regardez les prix ! On est loin du mythe des armes automatiques dans les supermarchés pourtant mis en avant dans la plupart des média… Mais retour à nos moutons. On note ici qu’il est question de « Gun », à savoir, un terme englobant l’ensemble des armes dotées d’un canon comme évoqué précédemment. C’est ainsi très différent du « MG » Allemand, désignant « MaschinenGewehr », que l’on pourrait traduire par « fusil automatisé », terme employé pour désigner les mitrailleuses et fusils-mitrailleurs… mais laissons Goethe en dehors de tout ceci…pour le moment.

De nos jours, pour les amateurs d’armes, « Machine Gun » désigne la famille des mitrailleuses et fusils-mitrailleurs. Au sein de cette large famille, on rencontre fréquemment l’usage de quatre sous-groupes :

  • Les « Standard Machine Gun » : cette expression est rarement employée et ne sert généralement qu’à mettre cette catégorie en opposition aux autres énoncées ici. Elle désigne généralement des mitrailleuses mises en œuvre depuis un trépied apparues à la fin du XIXe siècle et utilisant un calibre de fusil d’infanterie.
  • Les « Light Machine Gun » (LMG) : il s’agit de la famille des fusils-mitrailleurs apparus au début du XXe siècle à laquelle ont été ajouté les fusils-mitrailleurs employant des calibres intermédiaires et d’autres fusils-mitrailleurs considérés comme « légers », même en 7,62×51 mm et pesant 8 kg…vous commencez à comprendre que tout ceci n’a aucun sens… (Photos 10 à 12).
  • Les « Medium Machine Gun » (MMG) : il s’agit des fusils-mitrailleurs alimentés par bandes utilisant des munitions de fusil d’infanterie. Clairement, cette expression n’est quasiment jamais employée : toutes les armes de cette catégorie remplissent généralement les conditions nécessaires pour être considérées comme faisant partie de la catégorie suivante…
  • Les « General Purpose Machine Gun » (GPMG) : il s’agit des « MMG » disposant d’une polyvalence accrue de par leur accessoirisation (trépied, montage sur véhicule, bipied…). Ceci n’a aucun sens dans l’absolu : à un niveau industriel, toutes les armes peuvent être dotées d’accessoires (Photo 13). C’est juste une question de volonté…et d’argent !
  • Les « Heavy Machine Gun » (HMG), il s’agit des mitrailleuses employant les munitions qualifiées de « gros calibre » par nos camarades Anglo-Saxons, à savoir les 12,7×99 mm, 12,7×108 mm, 14,5×114 mm, etc, mais sans tomber dans des calibres supérieurs ou égaux à 20 mm : il est alors généralement question de « cannon ». Pour rappel, dans l’armée Française, les munitions de gros calibre commencent au-delà du 40 mm…il faut respecter l’exception culturelle on vous dit !

On touche du doigt ici – du point de vue de votre serviteur – les deux problématiques principales semant le trouble dans la catégorisation d’une arme à feu :

  • Dès lors qu’on met trop d’armes différentes dans une même catégorie, celle-ci se vide de sens.
  • Il n’est absolument pas possible de catégoriser une arme par un emploi en particulier !

Ces deux problématiques sont connexes, mais nous allons y revenir…finissons-en avec nos camarades Anglo-Saxons et avec cette rétrospective historique en premier lieu…

Aussi, nous passerons rapidement la catégorie des « Automatic Rifle » qui désigne des armes d’épaule automatiques d’une façon beaucoup trop généraliste dixit Wikipédia. Pêle-mêle, des fusils-mitrailleurs (Lewis, Chauchat…), des Battle-Rifles (M14, FAL, G3…) et des fusils d’assaut (M16, AK-47…). Ici, il semble bien que l’idée originale – sans doute fantasmée par les concepteurs du BAR 1918 – ne permet tout simplement pas de désigner quoi que ce soit, tant d’un point de vue pratique que technique, qui corresponde à une définition suffisamment précise.

Pour les « mitraillettes » (on garde ?), l’expression employée par nos amis Anglo-Saxons est « submachine gun » (SMG – Photo 14). Et ici, tout comme « mitraillettes », le terme peut parfaitement décrire l’arme dont il est question, le préfix « sub » induisant une notion de réduction.

Pour les pistolets-rafaleurs, l’expression de « Machine Pistol » s’est imposée. Ici, on sent clairement que cette dernière dérive du « MaschinenPistole » Allemand. Elle est assez perturbante car « Machine » peut être traduit dans ce contexte par « mécanisé ». L’expression pourrait donc aussi bien désigner une arme semi-automatique… n’était-il pas plus simple d’appeler ces armes des « Automatic Pistols » ? Ah oui, c’est déjà pris…

Il était une fois en Allemagne Nazie…

Le décorum existant au début de la Seconde Guerre mondiale planté, nous allons bien évidemment évoquer ici le cas du « SturmGewehr », soit littéralement « fusil d’assaut » dans la langue de Goethe (Photo 15). Nous ne referons pas ici le match de savoir qui a la primeur de quoi d’un point de vue conceptuel…ce n’est pas le sujet. Quoi qu’il en soit, après quelques hésitations sémantiques (tout d’abord « MaschinenKarabiner » puis « MaschinenPistole » …et oui, encore !), nos cousins Germaniques baptiseront « SturmGewehr » leur fusil automatique à sélecteur de tir de calibre intermédiaire de première génération (ici, le 7,92×33 mm Kurz – Photo 16). Faudrait-il ainsi comprendre qu’il s’agit d’une arme dont la vocation première est l’assaut ? Parce que clairement…ce n’est pas le cas ! Bien au contraire, loin d’être enfermé dans un rôle, le « fusil automatique à sélecteur de tir de calibre intermédiaire » est probablement, au moment de sa parution et jusqu’à nos jours, l’arme à feu la plus polyvalente imaginée ! Elle propose un compromis qui permet de répondre à la plupart des besoins sur le champ de bataille et ce aussi bien en situation offensive que défensive. Alors, évidemment, nous sommes parfaitement conscients que ce terme de « SturmGewehr » ne reflète en rien l’usage auquel se prédestine l’arme, mais est bien une expression de propagande de l’Allemagne Nazie, tout comme celui de « Wunderwaffen ». Aujourd’hui, nous parlerions, en tout hypocrisie d’un « élément de langage » (je vous avais prévenu : aujourd’hui, je dénonce !). Le problème, c’est que finalement bien peu de personnes sont au courant de ce détail sémantique, ni des réalités qui se cachent ou devraient se cacher derrière.

En Occident, le concept sera d’autant plus mal compris qu’il ne sera pas immédiatement suivi d’une descendance. En effet, à la fin de la Seconde Guerre mondiale, si plusieurs pays envisagèrent l’adoption d’une arme en calibre intermédiaire (notamment les Belges et les Anglais), l’OTAN sous hégémonie États-Unienne imposera le 7,62×51 mm comme calibre « standard ». Les performances balistiques de ce calibre sont similaires aux munitions pour fusil d’infanterie employées par les différents belligérants pendant les deux guerres mondiales, soit environ 50% d’énergie supplémentaire par rapport à un calibre intermédiaire.

Il s’en suivra une génération d’armes à la vocation « mal taillée » en 7,62×51 mm dont le mode automatique permet seulement de cocher une case sur une fiche descriptive (ou dans un appel d’offre…). On compte notamment dans cette famille les FAL, M14 et G3…même si l’histoire des armes Belges et Allemandes est empreinte du concept de calibre intermédiaire (Photo 17). Bien que ce type d’arme ait émergé dans l’immédiat après-guerre, l’expression « Battle Rifle » utilisée aujourd’hui pour les désigner n’est globalement employée qu’à partir de la fin des années 1990 / début des années 2000. Cette famille d’arme est aujourd’hui étendue à des matériels dont on peut clairement questionner la légitimité : classer dans la même catégorie le M14 et le Garand M1 ne fait à notre sens…que peu de sens (Photo 18) ! Pire, nous avons vu récemment sur certaines pages Wikipédia, des fusils en 5,56×45 mm classés comme « Battle Rifle » …ah Wikipédia : pour le meilleur comme pour le pire…à chacun de faire le tri ! À l’inverse, pendant la Guerre Froide, ces « battle rifles » était parfois nommés… « fusil d’assaut ».

Cependant, en Occident, l’expression « fusil d’assaut » sera ré-actualisée avec l’arrivée des armes en 5,56×45 mm, AR-15 en tête (Photo 19). Précisons au passage que le « AR » des « AR-10 » (en 7,62×51 mm) et « AR-15 » (en 5,56×45 mm), parfois pensé comme « Assault Rifle », désigne en réalité « Armalite Rifle », un baptême récurant à toutes les armes de la marque.

Pendant ce temps, de l’autre côté du rideau de fer, le terme « fusil d’assaut », jargon National Socialiste, est apostasié. Les armes des familles AK-47, AKM et AK-74 sont simplement des « Avtomat » : des « automatiques » (Photo 20). On note que le terme semble avoir été employé seul (car déjà employé accompagné de « Vintovka » – fusil – dans l’AVS-36) pour la première fois avec l’AS-44, à une période où le terme de « Sturmgewehr » n’était peut-être pas encore répandu. Preuve s’il en fallait qu’en Union Soviétique, le sens des mots n’était pas déconsidéré : on cache bien des choses dans le langage. Enfin, dans certains pays du Pacte de Varsovie, l’équivalent de l’expression « pistolet-mitrailleur » fut employé pour ce type d’arme : Allemagne de l’Est, Pologne, Roumanie… (Photo 21).  Ici, si la chose fait encore moins de sens que pour un « MP-18 », on retrouve la même volonté (sans doute initiée par Moscou), de rejeter la sémantique propagandiste Nazie au profit d’une expression plus « neutre » …quitte à employer une expression totalement inadéquate ! Car clairement, un AK-47 n’a rien d’un pistolet mitrailleur…

De la catégorisation…

Après ce premier tour d’horizon historique et géographique (combien reste-t-il de lecteurs ?), un constat que l’on peut faire aujourd’hui est qu’il y a globalement deux façons d’envisager la catégorisation d’une arme :

  • Certains le feront par un emploi en particulier (et supposé premier) de l’arme.
  • D’autres, en fonction de certains critères de l’arme elle-même.

Si les premiers sont à notre sens clairement majoritaires à ce jour, affirmons-le sans détour : nous faisons partie du second groupe ! De notre point de vue, comme déjà évoqué, catégoriser une arme selon un emploi en particulier n’a aucun sens, car une même arme peut tout simplement trouver plusieurs emplois. Dès lors, la catégorisation ne peut faire sens – toujours selon nous – que si elle renvoie à certains critères définis avec précision. Ces critères aideront, dans un argumentaire ou une étude, à se référer à des choses qui sont « comparables ». Car c’est bien normalement le but de la « catégorisation » : ranger les armes dans des catégories, pour désigner des choses qui sont comparables.

Sans prétendre établir ici un système de classement universel (que personne n’utiliserait de toute façon), on peut à minima présenter les critères, qui permettent de mon point de vue, de décrire une arme de façon objective et donc de la catégoriser :

  • Le type : arme de poing / arme d’épaule. La question ne se résume pas à la présence d’une crosse d’épaulement : de notre point de vue, une arme de poing doit globalement permettre un usage efficace seulement à l’aide des mains et avoir un encombrement compatible avec le port dans un étui sans préjudice pour un usage quotidien dans une mission qui ne requiert normalement pas d’arme.
  • Le mode de fonctionnement : à un coup, à répétition manuelle, semi-automatique ou automatique, avec ou sans dispositif permettant de choisir son mode de tir dans le dernier cas (classiquement un sélecteur, mais aussi parfois l’étagement de la course de la détente).
  • Le mode d’alimentation…voire les modes d’alimentation. Magasin, boîtier chargeur, par bande… La capacité en elle-même n’est pas spécialement pertinente, car pour bon nombre d’armes, elle va relever d’un choix accessoire à l’arme.
  • Le calibre ou à minima, une catégorie précise de calibre : si la chose parait couler de source, il n’en est pourtant rien ! Il est récurrent de retrouver des comparaisons entre des armes en 5,56×45 mm, en 5,7×28 mm et en 9×19 mm…oui, nous parlons bien du concept de « PDW » que font certain, mais nous allons y revenir. Mais on peut effectivement envisager de regrouper certains calibres en catégorie : comparer du 5,56×45 à du 5,45×39 mm n’est pas aberrant, comme le fait de comparer du 7,62×54 mm R, du 7,62×51 mm et du 8×57 mm IS. Cependant, ici aussi, il faut veiller à ne pas remplir les catégories avec des choses peu comparables et ce afin – une fois de plus – de ne pas la vider de sens.
  • Les performances balistiques de l’arme à munition donnée : la vitesse initiale d’un projectile de masse connue (le top étant, d’une munition normalisée), avec quel niveau de précision à une distance représentative de l’emploi envisagé. Ces données permettent simplement de comprendre rapidement que parler d’un G36 et d’un G36CV, c’est parler de deux armes dont la balistique est finalement très différente…(Photo 22). Car non, le calibre n’est pas suffisant pour considérer les capacités de l’arme : tirer de la 5,56×45 mm SS109 dans un canon de 20 cm, c’est se priver d’une grosse partie de son potentiel énergétique et de sa précision, cette munition étant optimisée pour des canons d’environ 45 – 50 cm. Enfin, concernant les probabilités d’atteinte, il est important de connaitre la vitesse : aussi, se contenter de l’énergie, c’est se priver d’une information importante. Alors pourquoi ne pas évoquer la longueur du canon ? Et bien parce que celle-ci n’est que partiellement responsable de la vitesse à la bouche : la munition est « co-responsable ». Autant se focaliser directement sur le résultat avec une munition normalisée…
  • Le régime de tir applicable à l’arme : il s’agit de savoir ici quel volume de tir peut être délivré dans quel laps de temps. Ceci doit inclure, pour les armes automatiques, une idée concernant le seuil d’auto-inflammation par inertie thermique (el famoso « Cook-off”) ou la façon de s’en mettre à l’abri (par le tir à culasse ouverte). Clairement, il s’agit d’un point difficile à quantifier, mais néanmoins d’importance : on pourrait être en face de personnes qui utilisent un HK G36 (au hasard ?) de la même façon qu’une HK MG4…et qui s’étonnent des problèmes rencontrés !

Et constate ainsi ici que les facteurs relevant de l’ergonomie et de la technologie (choix des matériaux, technologie de fabrication, principe moteur…) sont quasiment absents. Et pour cause :

  • Une arme légère sera toujours préférable à une arme lourde (même si ça peut avoir des conséquences sur le comportement de l’arme au tir).
  • Une arme compacte sera toujours préférable à une arme encombrante.
  • Les critères d’ergonomie peuvent être subjectifs en fonction du public visé ou des missions envisagées. Par exemple, le sens du mot « compact » trouve-t-il le même écho chez une personne travaillant en civil « incognito » et chez un militaire en uniforme ?
  • Les choix technologiques devront trouver un écho à des critères de fiabilité et de modèles économiques qui transcendent la problématique des critères qui catégorisent le « vecteur de tir » que constitue une arme. Et pourtant ceux qui me lisent savent à quel point les considérations technologiques…sont celles qui me passionnent le plus !

Ainsi, on pourrait décrire un fusil d’assaut comme suivant (X désignant des valeurs ici indéfinies) :

Arme d’épaule automatique à sélecteur de tir, alimentée par boitier chargeur, avec une V0 de XXX m/s pour une munition XXX et un groupement de XX + XX cm (H+L) à XXX m (portée pratique maximale), tirant à culasse fermée et dévolue au tir semi-automatique soutenu et le tir automatique occasionnel à concurrence maximale de XXX coups tirés en XX secondes.

Certes, ça vend moins de rêve que « fusil d’assaut »…mais au moins, on sait « de quoi qu’on parle ».

Il est ainsi bien sûr possible de les regrouper en famille, mais de mon point de vue, il serait alors judicieux d’éviter totalement, en les nommant, toute notion d’emplois précis (« assaut », « défense », « usage général »…) pour se concentrer sur des critères…et bien plus généralistes mais univoques (ce qui n’est pas facile…). Mieux, il serait souhaitable d’attribuer des appellations neutres : « arme d’épaule de classe X » …comme pour les gilets pare-balles (classements suivants différentes normes, la plus employée étant celle du « National Institute of Justice » ou NIJ). Preuve – ici aussi, s’il en fallait – qu’on peut aborder un sujet de façon neutre avec des critères objectifs.

Dans le premier cas, les fusils d’assaut exploitants pleinement la capacité d’une munition intermédiaire de seconde génération deviendrait « armes d’épaules automatique à sélecteur de tir pour l’engagement 0-400 m » …c’est encore ce qui les définit le mieux, tout en étant encore trop « large ». Et dans le second cas, « Arme d’épaule de Classe X » (X étant un chiffre ou une lettre inconnue…pas une référence au X-Men !), les critères étant consignés dans une « convention ».

Les « Battle Rifle » exploitants pleinement les capacités d’une munition de 7,62×51 mm deviendraient dans le premier cas « arme d’épaule inutilement automatique à sélecteur de tir, pour l’engagement 50-600 m ». Pourquoi pas 0-600 m ? Embarqueriez-vous un « Battle Rifle » avec un canon de 40-50 cm pour faire du combat rapproché ? Dans le second cas, « Arme d’épaule de Classe X+1 » …

Au passage, pour les personnes affirmant (intrinsèquement à juste titre) « qu’on peut faire un but » à 600 m avec du 5,56×45 m et à 800 (voire 1000 m) avec une 7,62×51 mm…posez-vous la question de savoir si la chose est reproductible et exploitable en situation de combat par un fantassin ordinaire. Ne confondons pas « champ de tir » et « champ de bataille », et « temps de paix » et « temps de guerre ».

« Personal Defense Weapon » : un cas d’école

Une des dernières catégories d’armes à avoir fait date dans l’imaginaire collectif est le « Personal Defense Weapon » (PDW). À notre connaissance, l’appellation « PDW » est apparue au début des années 1990 avec le très innovant FN P90 en 5,7×28 mm. Elle désignait alors une arme d’épaule automatique à mode de tir sélectif qui emploie un calibre novateur. Ce calibre, clairement destiné à repenser la balistique des armes de poing et autres mitraillettes, affiche des caractéristiques balistiques en rupture avec ce qui se faisait dans le domaine (Photo 23). Le tableau suivant donne un aperçu comparatif de ce genre de munition par rapport aux autres munitions militaires :

Les données de ce tableau, classées par énergies décroissantes, sont issues de sources variables : constructeur (en priorité), Janes (faute de données constructeur) et  Wikipédia (faute d’autre chose !) ! Certaines données peuvent légitimement soulever des interrogations (dans notre cas, la V0 de l’UMP 45) : restons critiques !

On constate ici que la « principale » composante énergétique des « principales » munitions d’armes de poing occidentales, lorsqu’on les compare entre elles est :

  • Clairement la vitesse pour le 5,7×28 mm (et le 4,6×30 mm…mais est-ce un calibre d’arme de poing ? Autre sujet…)
  • Assez « mixte » pour le 9×19 mm
  • Plutôt la masse pour le .45 ACP

L’intérêt de la chose est alors double : augmenter la portée pratique (200 m contre environ 100 m pour la majorité des calibres d’armes de poing dans une mitraillette) et les capacités de perforation (la vitesse étant une des composantes majeures en matière de perforation). En restant dans les années 1990, le second fabricant qui semble – selon certaines sources sur internet – avoir rentré le « pied dans la pantoufle » fut Heckler & Koch avec une variante de MP-5K dotée d’une crosse pliante qui aurait alors été baptisée « PDW ». Nous n’avons pas trouvé de source papier (en Anglais ou en Français) datée d’époque employant cette appellation (et notamment pas dans le Jane’s Infantry Weapons 1993-94 qui présente l’arme comme un « submachine gun » et ne connaît pas encore de variante dotée de crosse), mais cela ne veut pas dire qu’elle n’existe pas ! Quoi qu’il en soit, cette appellation de toute façon actuellement employée par la marque relève clairement d’un argumentaire mercantile pur et dur. Dans l’absolu, ceci n’est pas un jugement mais un constat : ces arguments sont nécessaires pour les fabricants. Pour vivre, ils doivent vendre et pour vendre, convaincre. Mais argument mercantile tout de même car oui, le HK MP-5K, avec ou sans crosse reste une mitraillette compacte (voire de façon plus discutable, un pistolet rafaleur), dont les caractéristiques balistiques sont très différentes de celles d’un FN P90. De la même manière, la « Safe Action » d’un Glock reste une simple action : le pré-armement par le mouvement de la culasse est nécessaire pour armer le mécanisme de mise à feu, l’action de la détente seule ne suffit pas. Et évidemment, l’utilisation de cet argument mercantile a ouvert la voie à l’incorporation dans la catégorie des « PDW » – qui désignait initialement une arme aux caractéristiques uniques – tous les pistolets-mitrailleurs compacts et même, pourquoi pas les pistolets-rafaleurs !

Au début des années 2000, Heckler & Kock apporte une vraie réponse technique au FN P90 en 5,7×28 mm avec le MP-7 en 4,6×30 mm…et c’est bien la preuve que le MP5-K – pourtant de la même marque – ne se battait pas dans la même catégorie (Photo 24) ! Là aussi, l’arme sera qualifiée de « PDW » : mais ici la chose nous paraît parfaitement justifiée si on fait la comparaison avec le P90. Et la famille historique s’arrête globalement là… évidemment, on trouve çà et là des armes réemployant ces calibres, mais leur importance opérationnelle (et même commerciale) est négligeable si ce n’est nulle.

Ceux focalisant sur un emploi particulier de l’arme y ont ajouté au fil du temps des fusils d’assaut « sub-compact » (donc, des armes tirant un calibre intermédiaire) et même l’USM1, qui fait un peu figure d’arme orpheline en termes de catégorisation (ce qui n’est pas une critique !). Alors de notre point de vue, la catégorie ainsi créée par les personnes défendant « l’emploi spécifique contre les critères » est devenue tellement large qu’une fois encore, elle se vide de sens. Ainsi, on pourrait se demander : est-ce qu’un Derringer est un « PDW » ? Sa mission est bien « la défense personnelle » plus que tout autre !

En conclusion

Évidemment, nous ne prétendons pas ici révolutionner la sémantique mondiale en matière de catégorisation d’armes à feu. Notre objectif est plus humble et plus réaliste : permettre à notre lectorat d’affranchir leurs réflexions personnelles des « catégorisations » dans lesquelles « le choix des mots » a enfermé les armes. Nous emploierons sans doute pour encore longtemps les expressions « fusil d’assaut », « Battle Rifle », « PDW » et « GPMG » …sans doute jusqu’à ce qu’une nouvelle sémantique mercantile ou idéologique soit inventée pour vendre ou convaincre que « ce produit est le meilleur ». IAR ? HCAR ? Pour vous le vendre, ou vous envoyer à la mort avec ! Vous l’aurez compris, nous n’aimons pas ces catégorisations putassières. Mais comme toujours faites-vous votre propre idée : je ne suis ni voyant, ni prophète, ni John Wick…simplement un technicien.

Arnaud Lamothe

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    Arnaud Lamothe

    Expert près la Cour d'Appel de Limoges, ancien contrôleur des services techniques du ministère de l'Intérieur, cofondateur du site LAI Publication, Arnaud est un spécialiste des armes de guerre de petit calibre. Auteur d'articles, il désire au travers de ce site partager sa passion et ses connaissances pour ces sujets.

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