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Retour vers le futur : Pietta Snubnose face au Hammond Bulldog !

L’autre jour en garant ma DeLorean, je remarquais sur le siège de la passagère un Derringer extraordinaire, sans doute tombé du sac d’une fatale beauté de l’Ouest !

Machinalement je ramassais l’objet qui me parut immédiatement d’un poids respectable. Ma nuit fut peuplée de rêves étranges, et, au petit matin, je tenais une idée de duel improbable :

J’ai à la maison un Colt 1851 revu et corrigé par Pietta qui en fit une sorte d’énorme Back Up avec sa poignée compacte en bec de corbin et son surprenant canon de 3 pouces. J’utilise fréquemment ce gros jouet pour tirer à la maison avec les sympathiques kits H&C ; pourquoi ne pas le confronter à ce Derringer Hammond Bulldog, témoin d‘une autre époque mais à la vocation autrement moins ludique ? Le calibre de ces deux armes est le même, c’est bel est bien le puissant .44, mais si l’un est un « Cap & Ball », l’autre est à cartouche métallique à percussion annulaire, le fameux .44 Henry des premières Winchester.

Le Hammond Bulldog

Mais, découvrons tout de suite ce Hammond Bulldog tombé du ciel ; ce qui saute aux yeux immédiatement c’est sa très grosse taille : 20 cm de long, c’est énorme pour un Derringer ! Le deuxième point marquant en est la ligne bien particulière, toute en rondeur avec un côté « galet » assez marqué. Ensuite, dès la prise en main, c’est le poids qui frappe : Rien moins que 700 grammes, ce qui est respectable ; et il n’y a pas que le poids qui l’est, le calibre aussi : .44 (11,17 mm) avec une longue chambre permettant d’accueillir le .44 Henry. L’arme n’est qu’à un seul coup…je serais presque tenté de dire deux, tellement l’aspect contondant de l’objet est frappant, si j’ose dire…

Lors des premières manipulations, le système de l’arme se révèle lui aussi exceptionnel : Pour l’ouvrir, il suffit d’appuyer sur la hausse et ensuite de tourner la culasse vers la gauche, elle va alors simultanément reculer suffisamment pour laisser opérer l’extracteur. L’axe de rotation de cette culasse est par ailleurs énorme et constitue le support du canon qui commence en forme de console pour se terminer avec un profil polygonal à la bouche, surmontée d’un fin guidon en laiton. La rigidité de l’ensemble est sans faille et la finesse des organes de visée peuvent laisser espérer une certaine précision ; nous verrons bientôt ce qu’il en est. L’armement s’effectue le plus simplement du monde en armant le chien jusqu’au second cran avec le pouce et le départ est assuré par une détente encastrée dite Mexicaine à la course très réduite et dont le poids est très raisonnable. La qualité de l’ensemble et du bronzage (pour le canon ; la carcasse et la culasse sont jaspées par le procédé du « case-hardening »)est vraiment exceptionnelle, ainsi que celle des marquages rencontrés sur l’arme et que je vous présente ici aussi. Enfin, le canon porte de larges rayures au pas très lent qui ont eu le bon goût de nous parvenir intactes. Le numéro de série est fortement mais discrètement apposé sur le bas de la carcasse, sous la plaquette gauche (en gutta percha) qui porte elle-même ce numéro.

Cette petite présentation de l’objet permet déjà au lecteur de se faire une idée de l’arme, mais, quid de son histoire ? Voici donc ce que j’ai pu en apprendre à travers le net et la littérature, en essayant comme à mon habitude de trier le bon grain de l’ivraie : les frères Hammond (Henry et Lewis) déposèrent un premier brevet en pleine guerre de sécession (1863) pour une carabine à culasse rotative chambrant une cartouche de .44 Rimfire (RF)…mais la fin du conflit fit tomber le projet à l’eau. Dès 1865 et après avoir créé la « Connecticut Arms & Manufacturing Co » à Naubuc (près de Hartford) ils purent enfin commercialiser leur « Bulldog » basé sur ce brevet USPTO N° 44798 (Photo 9) ; le marquage de l’arme en indique la date : 25 octobre 1864. Ce modèle unique fut décliné en plusieurs finitions, dont une nickelée, et plusieurs calibres semble t-il : du .41 au.50 Rimfire. Cependant, jusqu’à ce jour je n’ai rencontré que des armes en .44RF avecun canon bronzé et une carcasse jaspée, comme l’exemplaire qui illustre cet article. La production atteignit 7400 exemplaires selon les sources consultées et semble avoir pris fin vers 1868 ou 1880 suite à des difficultés financières.Enfin, pour la petite histoire, la légende Américaine voudrait que cette arme fut portée par Wild Bill Hickok et surtout par Mary Katherine Horony, maîtresse de Doc Holliday…voilà qui donne à rêver !

Le PiettaSnubnose et les Kit H&C

Passons maintenant à l’autre protagoniste de ce duel pour rire : tout le monde connaît de longue date la production Western de Pietta dont un des chevaux de bataille est le Colt 1851 dont je ne me lancerai même pas à esquisser l’histoire tant elle est connue. La firme Italienne commença cette épopée vers 1964 à travers une fabrication traditionnelle avec des machines capables souvent du meilleur, parfois du moins bon. Seulement voilà, depuis quelques années les frères Pietta sont passés à l’ère du numérique et leur production, tout en demeurant à prix modique, est passée à la qualité des meilleurs de la concurrence, voire mieux parfois !

Pour ma part, j’ai toujours aimé ces répliques, rapidement revendues pour cause de non emploi : les aléas de la poudre noire et de la capsule, ainsi que le nettoyage qui s’ensuit m’ont toujours découragé…jusqu’au jour où j’ai eu la chance de découvrir les remarquables kits pour munitions non létales de la sympathique firme H&C bien connue des collectionneurs français. J’ai donc acheté un premier kit…puis deux, puis trois, et maintenant je dois en avoir six en tout ! Du coup j’ai racheté des révolvers et redécouvert le plaisir du tir ludique au révolver et à la maison ! Comme tous, j’ai quelques révolvers qui sont des copies exactes des anciens Colts, mais je leur reproche un peu leur dimension importante ; aussi, quand Pietta a sorti son 1851 Snubnose en calibre .44, j’ai vite craqué malgré son caractère non strictement historique! Sa magnifique poignée en bec de corbin, finement quadrillée est en effet d’un attrait majeur ; elle est similaire à celle du non moins réputé Colt Lightning ! Pensez donc, j’ai enfin un révolver compact, avec une crosse au maniement tout en douceur, et grâce aux kits H&C facile à utiliser et vite rechargé, d’autant que je dispose de plusieurs barillets qui me permettent de tirer relativement rapidement 24 coups, sans crainte de long feu ou d’enrayages !

Je rappelle au passage le principe de ces kits comportant six cheminées forées de telle manière qu’elles peuvent recevoir des petites cartouches de .22 à blanc servant de propulseur à des diabolos en plastique souple de calibre .38 (généralement baptisé .36 dans le cas des révolvers « Cap & Ball » américain) ou .44. Les projectiles sont extrêmement légers (environ 1 gramme en .44), réutilisables presque indéfiniment, et enfin faciles à arrêter avec un piège à balles réalisable en carton et plastique. Enfin la précision est stupéfiante et avec un canon standard il est facile de rester dans le noir d’une C50 jusqu’à vingt mètres, les jours sans vent !

Le duel

Voici donc maintenant approcher l’heure de vérité : Quelle précision attendre de ce gros révolver aussi court que lourd (à peine 21 cm de long pour un poids de 950 grammes) doté d’une ligne de visée uniquement composée d’un cran dans le nez du chien et d’un minuscule guidon cylindrique en laiton ? Je publie ici une cible assez parlante, réalisée à 15 mètres dont les trous irréguliers ne traduisent que la faible vitesse du projectile. (Nota : elle est plus importante avec un canon long, surtout en calibre .36 et la découpe du carton devient aussi franche qu’avec une Wad Cutter). Si vous comparez maintenant les deux armes côte à côte, vous pouvez comprendre comment l’idée de ce face à face a pu germer dans mon esprit !

Il s’agit maintenant de mettre le Hammond face aux cibles, mais avant, un petit peu d’imagination et un peu de travail s’imposent ! En effet rappelons nous que si cette arme est en calibre .44 (celui des diabolos H&C) elle est aussi en percussion annulaire…Je me suis donc simplement rappelé des productions de cette entreprise permettant d’utiliser les petites cartouches de .22 insérées en périphérie de quelques calibres désuets comme le .32 annulaire par exemple. Quelques prises de cotes, un morceau de laiton et un ami tourneur allaient permettre de faire revivre notre Derringer sans problème : voir la photo 6 de l’ensemble douille et balle posé tel qu’il se présente dans la chambre. La procédure de chargement est donc très simple : Ouvrir la culasse, pousser un diabolo dans la chambre avec le doigt, insérer la « douille laiton » derrière avec son petit fraisage en face du percuteur, poser la cartouche de .22 dans son logement, refermer la culasse…il ne reste plus qu’à armer le chien face aux cibles ! Nota : pour recharger l’arme il suffit d’ouvrir la culasse et l’extracteur fait son office…

Après avoir maîtrisé la détente relativement dure (de sécurité pourrions nous dire) les résultats ne se font pas attendre…et ils sont très positifs car la ligne de visée est assez longue, ainsi que le canon. Par ailleurs, comme il n’y a pas d’entrefer comme sur un révolver, les vitesses obtenues sont supérieures, autre gage de précision. Voici la photo 10 de ce qu’on peut obtenir avec cette arme historique (noter que j’ai fait cet essai à la distance maximum permise par ma cour et à bras franc: 23 mètres !).

En conclusion

En guise de conclusion à cette confrontation je retiendrai la puissance et la précision hors du commun du Hammond Bulldog : Si on pense n’avoir qu’un coup à tirer, c’est l’arme qu’il faut choisir ! La réplique du Colt revisitée par Pietta et H&C offre pour sa part un aspect ludique extraordinaire, doublé d’une fiabilité que n’avaient sans doute pas les originaux avec leurs capsules capricieuses…Voilà, j’espère que cette petite aventure sans prétention vous a diverti…si c’est le cas, promis, je ressortirai la DeLorean du garage pour aller vous chercher d’autres armes originales !

Marc Barret

Nota : Cet article est aussi consultable sur le site de l’UFA : https://www.armes-ufa.com/

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    Marc Barret

    Passionné d’armes et d’histoire, Marc Barret est l’auteur de nombreux articles dans les revues spécialisées françaises. Son intérêt est particulièrement centré sur les armes du XIXe siècle, les inventions de John Moses Browning et les productions de la FN Herstal.

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