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5 - Le pistolet-rafaleur Soviétique Stechkin

Mais qu’est-ce qui a bien pu passer dans la tête des Soviétiques au lendemain de la Seconde Guerre mondiale pour développer et adopter un pistolet-rafaleur ? S’il est évident que cette période fut incroyablement fertile en matière de conception armurière, on se demande vraiment en quoi l’adoption d’une telle arme put être pensée un moment comme « une bonne idée ». Peut-être que ce mystère réside dans l’arrivée d’un nouveau type d’arme, le « fusil d’assaut », qui avait rebattu les cartes du combat d’infanterie et quelque peu déclassé le pistolet-mitrailleur. Dès lors quelle place pour les autres armes ? En tout cas, de cette errance conceptuelle naîtra une arme atypique : l’APS de I.Y. Stechkin.

Un apport tactique discutable

Le pistolet rafaleur « Автоматический Пистолет Стечкина » ou АПС (« Avtomaticheskiy Pistolet Stechkina » ou APS, soit « Pistolet Automatique Stechkin ») fut conçu en parallèle du pistolet Makarov au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Comme pour le Makarov, c’est à Toula, un des grands lieux de l’armement Russe, que Igor Yakovlevich Stechkin se voit confier la tâche de concevoir cette arme à tir sélectif, destinée originellement aux officiers, sous-officiers et quelques unités spécialisées. Pour une fois, il semble que la chose se soit passée sans concours,  fait assez atypique chez les Soviétiques en matière d’armement petit calibre. Ce développement aura lieu à la fin des années 1940 (de nombreux tests ayant été réalisés entre 1948 et 1949), et, en 1951, l’APS est adopté parallèlement au Makarov. On peut d’ailleurs s’interroger sur les liens qui existent entre les deux armes conçues au même moment et au même endroit : les similitudes mécaniques étant troublantes. Nous invitons d’ailleurs le lecteur à lire préalablement l’article sur le Makarov (en lien ici), où beaucoup d’éléments évoqués ici sont détaillés, dont le développement de la munition de 9×18 Makarov. Si l’APS est d’une conception mécanique remarquable (et nous y reviendrons), elle connaîtra cependant une diffusion plus limitée qu’initialement prévue. Sa production sera d’ailleurs stoppée très rapidement dans la seconde moitié des années 50 (1958 selon certaines sources). L’arme était vraisemblablement trop coûteuse à produire et son apport tactique s’avère un peu discutable.

Parce que toute la question est ici : un pistolet rafaleur, pour quoi faire ? Ici, la chose paraît simple, il s’agit de mettre entre les mains du public énoncé plus haut, une arme plus apte tactiquement que l’est un simple pistolet, mais sans l’encombrement d’un pistolet-mitrailleur. Il faut rappeler que la comparaison se fait alors avec l’excellent, mais tout de même encombrant PPS-43. Et quand nous parlons de comparaison, nous parlons bien du travail qui sera mené lors de la conception de l’arme et des essais au tir. La chose paraît donc logique : faire une arme ayant la capacité tactique d’un pistolet-mitrailleur, mais dont l’encombrement est celui d’un pistolet semi-automatique…c’est un « Personal Defense Weapon » (PDW) qui ne dit pas son nom ! La chose est naturelle, le concept de PDW ne sera formalisé que bien des années plus tard. Il y eut certes, des prémices historiques : LP 08 et Mauser C96 (dont la variante tirant en rafale M712 « Schnellfeuer ») à ne point en douter, mais aussi suivant les points de vue, la carabine USM1… Mais à chaque fois, ces armes ont « raté le coche » d’un emploi durable en tant que telles. Et pour cause, ces armes qui ont souvent le « cul entre deux chaises », sont rattrapées par la réalité : leur apport en matière tactique par rapport à une arme de poing classique est, certes, significatif (augmentation des probabilités d’atteinte et des distances d’engagement) mais se fait souvent au prix d’une contrepartie peu acceptable pour un port quotidien. Quelle contrepartie ? Tout simplement le poids et l’encombrement tout de même très supérieurs à une arme de poing ordinaire. Pourquoi cette contrepartie est-elle peu acceptable pour le public concerné ? Eh bien, tout simplement parce que le combat d’infanterie n’est pas leur mission principale…et que si la situation se transforme en combat d’infanterie, alors il sera préférable de se rabattre sur du matériel plus « classique » : à l’époque de la mise en service de l’arme, c’est le tout nouveau fusil Kalashnikov !

Dans son ouvrage « Soviet Small Arms and Ammunition », D.N. Bolotin rapporte que l’arme, de mémoire même de I.Y. Stechkin, fut extensivement testée en champ de tir. Mais le problème est bien là : la vocation unique et entière de ce type d’arme n’est pas le tir ! Le port quotidien hors « situation » de combat est une composante majeure de son emploi. Et là, le Stechkin n’est pas à son avantage : en comparaison d’un pistolet (surtout du Makarov – Photo 07), il est lourd et encombrant. Et sur un champ de bataille, on doit se sentir vite seul avec un Stechkin en 9×18 M quand tout le monde autour est équipé en Kalashnikov en 7,62×39 ! Et ça, les PDW « modernes » de chez H&K et FN l’avait bien compris en adoptant un calibre (un de plus logistiquement… « chouette ») plus apte avec la distance.

Est-ce que l’arme trouve une meilleure place dans une mission de type police ? Eh bien, pas vraiment :

  • Hors intervention, elle est trop encombrante et la rafale est inutile pour la mission de police quotidienne.
  • En intervention, pourquoi se contenter d’une arme à l’ergonomie « bâtarde » (on ne sait pas vraiment quoi faire de sa main faible…) et ne pas opter pour une plateforme plus stable (un PM) voire plus puissante (un fusil d’assaut, peut-être compact) ?

On comprend alors aisément pourquoi les Soviétiques, sans doute rapidement confrontés à la réalité de leur coûteuse erreur, ont si promptement mis fin à la fabrication de cette arme.

Alors évidemment, le Mauser C96 et son utilisation notable dans la toute jeune URSS a eu une influence sans doute décisive dans le choix de développer l’APS. Mais la chose devient alors encore plus troublante : connaissant les avantages et les défauts offerts par cette solution technique, pourquoi persister ? Eh bien, parce que face au déroulement de l’histoire, il est peut-être nécessaire d’apprendre de ses erreurs. Et cet apprentissage est sans doute le plus grand apport qu’apporta l’APS à l’URSS.

À Toula, une certaine unicité au tournant des années 1940

L’ergonomie de l’arme est très proche du Makarov, ce qui semble bien évidemment ne pas être le fruit du hasard. On est donc en face d’un pistolet doté d’une platine simple et double action sur laquelle on retrouve le crochet de chargeur au bas de la poignée, un arrêtoir de culasse et un sélecteur sur le côté gauche (Photos 08 et 09). Le sélecteur de tir se tient en lieu et place de levier de sûreté / désarmement du Makarov. Ce sélecteur comporte 3 positions (de l’avant vers l’arrière) :

  • Sûreté / désarmement : « ПР », pour Предохранитель
  • Coup par coup : « ОД », pour Одиночная
  • Rafale libre : « АВТ », pour Автоматическая

La mise en sûreté de l’arme verrouille la culasse et le chien comme sur le Makarov, mais aussi le percuteur, ce qui n’est pas le cas sur le Makarov. Il faut dire que le percuteur du Stechkin est bien plus lourd que celui du Makarov : son inertie est donc bien plus grande.

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